Où s’arrêtera-t-il ? Depuis quelque temps, Manuel Valls nous avait habitués à ses petites phrases et à ses positions de plus en plus réactionnaires.
Regroupement familial, réforme pénale, interdiction du voile à la fac ou défense inconditionnelle de la police à Trappes, cet été il n’a pas chômé... Sur la réforme pénale, sa guerre quasi-ouverte avec Christiane Taubira lui a permis cet été de bien soigner son image d’un « premier flic de France » dur, et de conforter les préjugés déjà très largement répandus dans la société. Lors du séminaire du gouvernement sur « la France en 2025 », en affirmant que « la question du regroupement familial peut être posée », Valls a réussi à s’attirer de nouveau les projecteurs. Enfin, sur le rapport du Haut Conseil à l’intégration qui proposait l’interdiction du voile pour les étudiantes à l’université, il n’a pas hésité à dire que les propositions étaient « dignes d’intérêt »... Une question après l’autre, Valls abandonne les positions traditionnelles de la gauche pour épouser celles de la droite.
Valls sarkoziste ?
Le bilan est lourd mais tout cela en fait-il un simple sarkoziste ? Sur la forme, les ressemblances sont fortes. Son art d’occuper les médias de manière permanente est clairement modelé sur Sarkozy qui lui-même, d’ailleurs, l’a appris des directeurs de communication de Tony Blair. Et, comme Sarkozy, il est animé par une très forte ambition personnelle.
Sur le fond, les positions se rapprochent mais il faut dire que Valls a commencé tôt. Il arrive que des hommes politiques de gauche passent par une phase plus ou moins radicale ou « révolutionnaire » dans leur jeunesse avant de « s’assagir ». Dès le départ, Valls, est, lui, très « sage ». En 1980, Michel Rocard, l’ancien « gauchiste » du PSU, est en train de se droitiser à vitesse grande V. Pourtant, c’est à ce moment que Manuel Valls, âgé alors de 17 ans, rejoint le PS et adhère au courant de Rocard ! À partir de là, Valls se situera à la droite du parti, avec une évolution qui en 2007 amènera Sarkozy à lui proposer un poste de ministre lors de sa politique d’ « ouverture »...
Valls refusera car son projet est d’embarquer l’ensemble de la gauche sur ses positions mais de l’intérieur. « Je pense que mon destin, mon choix, mon envie est de rénover la gauche en profondeur », dira-t-il à l’époque pour justifier son refus. À chaque fois qu’il pousse le bouchon trop loin et se fait taper sur les doigts, il bat tactiquement en retraite comme lors du conflit avec Taubira. De la même façon, lors de la dernière université d’été du PS à La Rochelle, il hurle sa fierté d’être « socialiste », malgré la flagrante contradiction, et se permet de se dire le plus grand ennemi du Front national, tout en développant une politique qui en fait le lit.
Pour l’instant, il est encore contesté par ce qui reste de la gauche au PS, mais il a été soutenu voire applaudi par bien d’autres à La Rochelle car il surfe sur la dérive néolibérale et sécuritaire de plus en plus assumée du PS, tout en étant un de ses principaux artisans. Pourquoi ne penserait-il pas alors que ce sera bientôt son heure ?
À l'été 2011, il déclarait : « Je reste convaincu que des hommes et des femmes comme Dominique de Villepin, François Bayrou ou Corinne Lepage, pour ne citer qu'eux, peuvent faire partie, s'ils le souhaitent, d'une majorité de large rassemblement ». Et pourquoi pas encore plus à droite, pourrait-on se demander. L’avenir nous réserve peut-être bien des surprises.