Publié le Mardi 22 avril 2025 à 13h00.

Vendôme : La mairie reporte un hommage aux Justes et stigmatise la solidarité avec Gaza

Le lundi 15 avril 2024, la mairie de Vendôme (Loir-et-Cher) a annoncé le report d’une cérémonie d’hommage aux Justes parmi les Nations, initialement prévue pour le 17 avril.

Cet événement devait se tenir au square Louise Michel, dans le quartier des Rottes, en mémoire de celles et ceux qui ont sauvé des Juifs pendant la Seconde Guerre mondiale.

Une décision motivée par le « contexte géopolitique »

Dans un communiqué, le maire de Vendôme, Laurent Brillard (DVD), justifie ce report par « le contexte géopolitique actuel, marqué par le conflit opposant l’État d’Israël et le Hamas », ajoutant que cette situation « suscite des sensibilités particulières au sein de nos différentes communautés ». Selon lui, la tenue de la cérémonie dans ce contexte aurait pu créer des tensions locales, notamment en raison de la mobilisation d’une partie de la population en soutien à la Palestine.

Cette justification a suscité de vives réactions, tant au niveau local que national. Plusieurs voix ont dénoncé une décision infondée, reposant sur des présupposés dangereux et stigmatisants à l’égard des militantEs solidaires de la Palestine.

Aucune contestation locale de la cérémonie

À ce jour, aucun collectif ni aucune association engagée dans le soutien à la cause palestinienne à Vendôme ou dans le département n’a exprimé de volonté d’entraver ou de perturber cette cérémonie. La décision de la mairie semble donc reposer non sur des faits concrets mais sur une crainte anticipée.

Cette interprétation a été relayée et amplifiée dans plusieurs médias de droite et d’extrême droite, certains allant jusqu’à accuser la mairie d’avoir cédé à des « pressions islamistes » ou à un « antisémitisme communautaire », sans aucune preuve à l’appui.

Une confusion entretenue entre antisémitisme et antisionisme

L’idée selon laquelle le soutien à la Palestine s’accompagnerait nécessairement d’antisémitisme repose sur un amalgame contesté. Si l’antisémitisme — la haine des Juifs en tant que groupe religieux ou ethnique — doit être combattu sans relâche, le droit de critiquer l’État d’Israël, sa politique coloniale et sa répression à Gaza, relève quant à lui du débat politique légitime.

De nombreuses organisations juives anticolonialistes, en France comme ailleurs, rejettent également cette confusion. En assimilant toute critique d’Israël à de l’antisémitisme, on invisibilise ces voix, tout en criminalisant les mouvements de solidarité avec la Palestine.

Une volte-face précipitée

Face à la polémique, la mairie de Vendôme est rapidement revenue sur sa décision. Le maire a maintenu la cérémonie à la date initiale, tout en annonçant le départ de son directeur de la communication, présenté comme responsable de la formulation maladroite du communiqué.

Mais cet épisode laisse une impression durable : celle d’un pouvoir local prêt à instrumentaliser la mémoire des Justes au nom d’un « ordre public » fantasmé, en stigmatisant des habitants et habitantes mobiliséEs contre une guerre jugée injuste. Refuser un hommage sous prétexte d’un prétendu « risque communautaire » alimente précisément les divisions qu’on prétend vouloir éviter.

Mémoire des Justes, luttes d’aujourd’hui

La mémoire des Justes appartient à toutes celles et ceux qui, aujourd’hui encore, refusent l’indifférence face à l’oppression. S’indigner contre les bombardements sur Gaza, dénoncer un système d’apartheid ou appeler à des sanctions contre un État colonisateur, ce n’est pas trahir leur héritage : c’est prolonger leur engagement contre l’injustice.

Radu Varl