Depuis plusieurs semaines, les grèves et les débrayages se multiplient dans plusieurs secteurs de la compagnie Air France.
La direction d’Air France/KLM a tiré profit de la courte crise du trafic aérien pour accélérer le « business plan » vanté aux actionnaires : 10 % des emplois au sol ont été supprimés dans le groupe en trois ans, soit près de 8 000 emplois. En même temps l’activité augmentait de 3 % malgré la crise. Effets directs : baisse nette des effectifs dans les aéroports (piste et comptoirs), dans les services commerciaux avec un développement de la sous-traitance, dans les secteurs de la maintenance… et des milliers d’emplois supprimés dans l’ensemble des services administratifs. Tout cela entraîne une dégradation brutale des conditions de travail, malgré le recours croissant aux services électroniques. Parallèlement, les augmentations de salaires depuis deux ans sont en retrait de plus de 2 % par rapport à l’inflation calculée par l’Insee.
Les résultats annoncés début mai montrent bien que, malgré la « crise », la direction a refait sa pelote. Quant au directeur général, Pierre-Henri Gourgeon, il a été généreusement augmenté de 412 500 euros (soit 45,8 % !). Dans le secteur de la maintenance – 9 000 salariés – le mouvement a démarré il y a plusieurs mois par un mouvement des mécanos moteurs de Roissy, avec le soutien de SUD Aérien et de la CGT, pour obtenir 50 points (plus de 300 euros brut) comme reconnaissance de leurs qualifications. Le 13 juin, des mécanos piste de Roissy, qui dépannent et contrôlent les avions entre deux vols, démarraient pour 32 points, avec le soutien d’un syndicat corporatiste des mécanos, affilié à l’Unsa. La revendication était avancée comme la contrepartie des responsabilités qui pèsent sur les mécanos lorsqu’ils signent les dossiers de remise en service. Cette responsabilité est partagée par tous ceux qui travaillent dans la chaîne avion. Aussi le mouvement s’est propagé, à l’appel des deux premiers syndicats de la direction industrielle, CGT et SUD Aérien, à l’ensemble des salariés. En quinze jours, de nombreux avions ont été cloués au sol, des vols supprimés. Mardi dernier, plus de 300 agents se sont rassemblés et ont manifesté devant le siège de la compagnie. À deux reprises, les grévistes ont bloqué les portes de l’usine équipements de Villeneuve-le-Roi (Val-de-Marne). Le mouvement se durcit, la direction cherche à sanctionner des salariés… et aujourd’hui l’Unsa veut casser l’élargissement à tous les métiers de l’industriel, mécontentant ses propres adhérents de ces secteurs. L’enjeu va être de maintenir l’unité de tous.
Au commercial France (vente à distance, help service internet...), qui emploie 2 000 salariés, le point de départ a été l’annonce en avril du passage à la sous-traitance de plusieurs activités. Pendant plus d’un mois, aucun syndicat « représentatif » du secteur n’a organisé de riposte ou même d’heures d’information. La mobilisation est venue directement des salariés de Montreuil et des services de province, organisés en réseau par internet, diffusant les informations que filtraient les principaux syndicats. Seul SUD Aérien a alors lancé le mouvement, mais avec l’appui de délégués et syndiqués CGT et FO, notamment : heures d’infos sauvages, grève le 6 juin. Du coup, l’ensemble des syndicats a appelé à la grève le 14 juin… mais sans aucune suite. La CGT a même réussi à dissuader ses sections de province de faire grève le 1er juillet avec SUD Aérien.
L’ensemble de ces mouvements témoigne de la combativité montante, du mécontentement face aux attaques tous azimuts de la direction. Mais il témoigne aussi de la passivité, voire de la complicité directe de la plupart des directions des syndicats du groupe.
Correspondant