Publié le Mercredi 25 novembre 2015 à 11h16.

Non à l’état d’urgence, au racisme et à la guerre

Deux semaines après les attaques terroristes qui ont tué 130 personnes à Paris, l’émotion est toujours présente. Elle se double d’un climat de peur, dû au traumatisme des attaques terroristes, mais aussi savamment entretenu par les déploiements de policiers et de militaires dans les rues et les lieux publics et par le discours des médias et de la classe politique qui ne cesse de marteler que la France est en guerre.

Différents sondages indiquent que 90 % des Français seraient en accord avec les mesures sécuritaires prises par le gouvernement. La peur est donc bien mauvaise conseillère...

Contre l’état d’urgence, défendre nos libertés démocratiques

La prorogation de l’état d’urgence pour trois mois, les différentes mesures qui l’ont accompagnée et les projets de modifications constitutionnelles, représentent une attaque majeure contre nos droits et nos libertés démocratiques. L’établissement du couvre-feu dans un quartier populaire de la ville de Sens ou l’interdiction des manifestations à Paris jusqu’au 30 novembre en sont les premiers exemples. Cet ensemble de dispositions législatives révèlent un déplacement du curseur politique vers la droite et l’extrême droite, puisque Hollande a repris des propositions du FN et de LR, telle la déchéance de nationalité pour les terroristes binationaux, l’assignation à résidence pour toute personne soupçonnée de terrorisme ou encore la dissolution de toute association présentant des risques de troubles à l’ordre public.

Il faut donc une large campagne pour dénoncer ces mesures et affirmer que le pouvoir ne doit pas utiliser les attaques terroristes pour museler l’opposition des associations, des syndicats et des politiques par rapport aux questions sociales, politiques et écologiques. Malgré l’interdiction de la préfecture, notre présence dans la rue en solidarité avec les migrantEs ce dimanche 22 novembre a montré qu’il était possible de ne pas céder à la pression. Les déclarations de la CGT sur leur refus de toute trêve sociale, les prises de position de la LDH, d’Attac, du Syndicat de la magistrature ou encore d’Alternatiba sont autant de points d’appui pour construire des collectifs et s’opposer aux mesures liberticides du gouvernement. Le maintien de la mobilisation pendant la COP21 et la réussite de la journée de mobilisation interprofessionnelle du 2 décembre deviennent dès lors des enjeux cruciaux.

Répondre au racisme, solidaire des migrants

Cette campagne de défense des libertés démocratiques doit s’accompagner d’une offensive contre tous les racismes et en solidarité avec les migrants. Depuis ce sinistre vendredi 13 novembre, les tensions racistes se développent : l’islamophobie a encore augmenté (dégradations de lieux de culte musulmans, agressions...) ; à Marseille, un juif a été attaqué à coups de couteau ; et les déclarations pour assimiler les migrants à des terroristes se multiplient...

Ainsi, qu’un terroriste, dont nous ignorons l’identité et la nationalité, soit arrivé en France depuis la Syrie en se faisant enregistrer en Grèce comme un migrant réclamant le droit d’asile a donné lieu à un déchaînement contre l’accueil des migrants en France et en Europe.

La campagne des régionales s’annonce dès lors particulièrement nauséabonde, et on annonce déjà un score de 40 % pour le FN dans la région PACA au premier tour.

Pour combattre Daesh, non à la guerre impérialiste

Depuis les attaques terroristes, les frappes françaises en Syrie se sont intensifiées, et Hollande tente de mettre en place une vaste coalition internationale pour lutter contre Daesh, coalition dont l’un des principaux pivots serait la Russie, fidèle alliée de Bachar el-Assad...

Daesh, organisation obscurantiste qui s’étend sur un territoire où elle prend de plus en plus les contours d’un État et depuis lequel elle développe un projet totalitaire et expansionniste, doit être éradiqué. Mais pas plus qu’hier, les interventions des grandes puissances internationales ne font partie de la solution, mais bien du problème : c’est bien ce qu’ont déjà montré les interventions militaires des États-Unis en Irak ou celle de la France en Libye.

Nous devons donc nous mobiliser contre les politiques impérialistes qui ne sèment que le chaos et la misère, mais aussi dénoncer les puissances régionales qui ont permis et soutenu l’émergence de Daesh, en premier lieu Bachar el-Assad sur lequel beaucoup souhaiteraient s’appuyer. La solidarité avec ceux qui résistent et s’opposent à Daesh sur le terrain – comme les Kurdes et l’opposition syrienne libre – exige en particulier leur armement. La reprise de Sinjar sur Daesh par les Kurdes irakiens en est la meilleure illustration.

Ce n’est pas donc pas en restreignant « ici » les libertés collectives ou en menant « là-bas » une guerre impérialiste que l’on peut combattre le terrorisme. Nous devons plus que jamais montrer que la réponse au terrorisme et à ceux qui proposent une société totalitaire ne peut venir que des solidarités et des luttes des exploités ; des luttes pour défendre nos droits démocratiques et sociaux, pour combattre le racisme et pour soutenir ceux qui se battent là-bas, en Afrique et au Moyen-Orient contre les dictatures obscurantistes.

Camille Jouve