Lundi 11 février, après s’en être entretenu avec Dieu lui-même, le PDG de la multinationale God and Cie Joseph Ratzinger, annonçait sa démission. Trop vieux, fatigué, inapte à honorer sa fonction, il réitérait ce qu’avait fait avant lui Célestin V en… 1294.Quel scoop ! Il n’en fallait pas plus pour mettre en ébullition les salles de rédaction. En France, qui comme chacun le sait est la fille aînée de l’église, ce non-événement a pris des proportions invraisemblables, et nous avons eu droit à quantité d’éditions spéciales. Ainsi, le 13 heures de France Inter – service public – nous imposait 24 minutes de propagande lénifiante et de spéculations sur le bilan du pontificat et l’incertitude de la succession.Ultra conservateur, homophobe et misogyne, par nature et par fonction, Benoît XVI aura marqué son règne par des prises de position constantes en faveur des forces les plus obscurantistes. Fervent admirateur d’Escriva de Balaguer, le fondateur de l’Opus Dei, il ne ménagera pas ses efforts pour réintégrer dans le giron de la maison mère les adeptes intégristes se réclamant de Monseigneur Lefèvre. Il n’hésitera pas non plus à canoniser des prêtres franquistes, au moment même où l’État espagnol réhabilitait les combattants républicains, après 70 ans d’amnésie et de révisionnisme.Ceux qui aujourd’hui osent nous parler de modernité en évoquant la démission du pape, passent par pertes et profits les positions criminelles qu’il a pu prendre en matière d’avortement et de contraception. Comment pourrait-on oublier qu’il osa déclarer que le préservatif « augmente le problème » du sida (no comment de votre hebdo préféré la semaine dernière) ? Comment oublier l’ignoble excommunication d’une mère, accusée d’avoir aidé à avorter sa fillette de 9 ans victime d’un viol ?Les comptes en banque du Seigneur sont impénétrables…Les raisons invoquées de la démission de Ratzinger paraissent d’une banalité mortelle. Pour autant, ce départ intervient dans un contexte extrêmement trouble, où le Vatican, et tout spécialement sa banque (l’Institut des œuvres religieuses) inspire les plus vifs soupçons aux experts financiers, avec ses 44 000 comptes secrets brassant 6 milliards d’euros, un vrai paradis fiscal… En nommant à sa tête le 15 février son vieil ami (fabriquant de vedettes de guerre) Ernst Von Freyber, Benoît XVI tentait de mettre fin à la crise avant son départ.La succession de Benoît XVI ne nous concerne pas. Le prochain pape, qui ne sera pas une papesse, ne fera que perpétuer une institution sclérosée, antidémocratique et éloignée de toute aspiration à l’émancipation. L’Église catholique, mais elle n’est pas la seule, restera un des piliers les plus sûrs de l’ordre patriarcal et capitaliste. Peut-être osera-t-on réformer à la marge les absurdités les plus criantes, comme le célibat des prêtres, ou ordonner des femmes ? Qu’importe. « Un pape démissionne, un autre pape est appeler à régner. Araignée ? Quel drôle de nom pour un pape. Pourquoi pas libellule… ou papillon. » (Jacques Prévert).Alain Pojolat