Publié le Samedi 12 février 2011 à 21h53.

Besancenot, sinon rien (le JDD du 12 février)

Le NPA, qui tient congrès ce week-end, attend la réponse de son leader pour 2012.

A la tribune, la révolution semble avoir la place d’honneur. Après le discours de militants tunisiens et égyptiens, Olivier Besancenot tempête. Il savoure cette "pichenette de l’Histoire" au moment où l’on assiste chez nous à "une déferlante de racisme" et d’"islamophobie". Ces révolutions "nous montrent la voie", tonne-t-il, lançant au pouvoir hexagonal en place: "Qu’eux aussi dégagent une fois pour toutes!" Difficile de croire après le feu d’applaudissements que Besancenot souhaite quitter la scène.

Alors partira, partira pas? Depuis longtemps, Olivier Besancenot ne cache plus sa tentation de raccrocher le mégaphone. Du moins de ne plus être le seul porte-parole de son parti. "Quoi qu’il en soit, il faudra compter avec ma voix. Je ne vais pas me retirer sur l’île de Ré", assure-t-il, à son arrivée à Montreuil lors du congrès de son parti.

Deux ans après la naissance du NPA, le rendez-vous de ce week-end doit enfin établir un porte-parolat collectif. Histoire d’accorder les paroles et les actes de cette formation qui dénonce la personnalisation de la vie politique. Présent dans les médias et les meetings, aux portes des usines, Besancenot a fini par représenter à lui seul ce jeune mouvement. "Il ne peut pas tout faire. C’est une pression trop forte de tout concentrer sur lui", explique Pierre-François Grond, membre de la direction.

Toujours facteur, Besancenot passe encore une partie de sa semaine à vélo pour distribuer le courrier. Peu de place donc pour le foot ou pour le reste. "Olivier incarne bien sa génération. Il veut avoir un peu de temps pour lui et ne pas militer 24 heures sur 24 comme Arlette et moi, à notre époque", rappelle Alain Krivine, l’ancien leader de la LCR.

"Prendre sa succession ou être à côté de lui n’est pas simple"

Olivier Besancenot, déjà deux fois candidat à la présidentielle, fera-t-il partie de ce pool de porte-parole? La question n’est pas tranchée et ne le sera probablement pas avant mars. "Prendre sa succession ou être à côté de lui n’est pas simple", juge Myriam Martin, pressentie pour être un des deux postes. D’un côté, le "renouvellement nécessaire". De l’autre, la crainte que cela ne soit perçu comme un signe de "retrait", à un moment où le parti est encore "en convalescence", après avoir connu une "crise existentielle" lors des régionales, comme l’admet Besancenot.

Au congrès, le débat est vif sur le bilan, dont Besancenot ne peut s’exonérer. Privilégiant les luttes, certains reprochent à la direction son "électoralisme". D’autres, au contraire, n’entendent pas être un "supersyndicat", et plaident pour une large alliance de la gauche de la gauche. L’hémorragie militante est patente. Au moins un tiers de ses troupes est parti. "Etre l’artisan du malheur du NPA, ce projet mort-né, doit peser sur lui. Il avait de l’or entre les mains et il l’a transformé en plomb" tacle Christian Picquet, ancienne figure de la LCR désormais au Front de gauche.

Comment se passer de cette tête d’affiche pour la présidentielle? "Il reste de loin la personnalité locomotive", reconnaît Pierre-François Grond. "La question n’est pas réglée. Il ne veut pas être le candidat permanent. Il n’aime pas ça", rapporte Krivine. Avant d’ajouter: "C’est le plus connu et le plus efficace pour défendre nos idées. A l’heure actuelle." Besancenot, lui, dit se sentir comme un poisson dans l’eau dans les luttes, et ne pense pas avoir "rendez-vous avec la France". "Je ne suis pas visité par cela." 2012 lui "paraît loin", surtout vu ce qu’il se passe de l’autre côté de la Méditerranée. Au NPA, on préfère toujours la révolution par la rue à celle par les urnes.

Arthur Nazaret