Majorité du groupe de travail CE-Cilt-GTE1
Adopter « nos réponses à la crise »Il y a près de huit mois, nous avons commencé à travailler sur un document permettant d’organiser la réflexion et l’action du NPA dans une situation de crise ouverte du capitalisme. Ceci, dans un état d’esprit visant à rassembler le NPA autour d’une discussion cruciale : répondre à la crise globale du système. Cette discussion et ce document n’appartiennent pas à une position. C’est pourquoi nous regrettons les partis pris des positions 2 et 4 qui ont décrété que puisqu’ils étaient en désaccord sur l’orientation alors forcément ils l’étaient aussi sur le programme. Sans que leurs textes apportent des réponses de qualité supérieure aux questions qui nous sont posées. Pour nous, il s’agit d’organiser une réflexion collective autour d’une hypothèse forte et que nous croyons vérifiée par les dernières évolutions de la situation. Cette crise est une crise majeure du capitalisme. Elle n’est pas close et elle est sans doute la plus grave depuis la dépression des années 1930. Elle est également multiple : économique, écologique, sociale, politique. Elle s’accompagne de bouleversements profonds et d’un changement d’axe géographique du capitalisme qui bascule vers l’Asie. Cela doit nous amener à deux attitudes : une certaine modestie (nous ne connaissons pas tout de la situation et n’avons pas de réponse sur toutes les questions) et une certaine gravité (une stratégie anticapitaliste est encore plus à l’ordre du jour). Elle implique une discussion pluraliste et un rassemblement de notre parti afin d’être prêts à affronter une situation politique mouvante qui peut encore s’accélérer. Depuis l’écriture et l’adoption du document par le CPN, la crise s’est accentuée. En particulier en Europe avec l’ensemble des attaques qui touchent la population et avec les différentes étapes de la crise de la dette. Comme nous le soulignions dans le document dès le printemps dernier, l’Europe est le maillon faible du monde capitaliste. L’euro est au centre de la tourmente et la construction européenne interrogée. Quant aux contre-réformes, comme celle des retraites en France, il est clair que la crise et ses effets obligent les gouvernements à accélérer le calendrier des démantèlements. Cette crise polarise donc la situation politique et sociale et conduit par exemple les gouvernements européens à démanteler le « modèle social » érigé après-guerre avec un degré de violence et de brutalité qui ne peut s’expliquer que par l’urgence créée par la crise elle-même. Comprendre celle-ci, et en particulier son articulation à la crise écologique, est donc une tâche prioritaire pour les anticapitalistes. Afin de dégager des pistes pour aider aux soulèvements des peuples et du monde du travail. Car il n’y aura pas d’issue progressiste à la crise sans une mobilisation d’ensemble et coordonnée des peuples d’Europe pour refuser de payer la facture d’une crise qui n’est pas la nôtre. À partir des conditions de vie, de la mise sous contrôle des banques dans le but de mettre en place un service public bancaire et de la nécessité d’un plan de transition social et écologique permettant de rompre avec le capitalisme, nous essayons de dégager trois pistes, trois propositions de rupture avec le système. Rupture avec le système mais rupture aussi avec la gauche « FMI » qui mène ou défend les mêmes politiques. Pour construire une gauche anticapitaliste indépendante capable de relever les défis de la crise. 1. Comité exécutif, Commission intervention sur les lieux de travail et Groupe de travail économie.
Position 2
« Nos réponses à la crise » ne convient pas au NPACe texte écrit conjointement par les camarades de la position 1 et de la position 3 est au minimum ambigu sur un certain nombre de formulations, et pas juste du point de vue du raisonnement politique global. Une autre base de travail est donc nécessaire, c’est la raison pour laquelle nous avons proposé un texte alternatif qu’il faudra évidemment améliorer collectivement à l’occasion du congrès : « Face à la crise, une politique pour renverser le capitalisme ». L’ambiguïté du texte des camarades de la P1 et de la P3 est liée entre autres à un certain nombre de raisonnements sur la crise qui peuvent être sur le fond assez compatibles avec ce qu’écrivent les anti-libéraux. Nous ne sommes pas d’accord par exemple pour dire que « ce sont les profits exorbitants [...] qui sont à l’origine de la spéculation et de la crise ». La crise a des racines bien plus profondes qui ne tiennent pas aux excès de la finance. De même est-il écrit à propos des plans d’austérité qu’ils « entraînent l’ensemble des économies dans une spirale vers le bas ». C’est l’argument classique des keynésiens (réformistes) pour justifier une politique « de relance par la consommation ». Il faudrait au minimum s’expliquer un peu mieux. La section revendicative du document est aussi fortement déficiente. Un exemple : le fait de reprendre une partie de l’orientation de la direction CGT sur la question des licenciements. Le mélange des genres est pour le moins surprenant : on est pour l’interdiction des licenciements, mais la suite de l’argumentation est un décalque de l’argumentaire du Nouveau Statut salarié de la CGT qui sert en fait à accompagner la précarisation générale ! On lit aussi que « les travailleurs doivent se saisir de la gestion des entreprises » : cette orientation de cogestion, là aussi prônée par la direction CGT et formulée telle quelle, n’a évidemment pas sa place dans notre programme. Mais au-delà, il y a un problème plus général que les camarades n’arrivent pas à résoudre malgré les retouches successives : l’absence d’un raisonnement qui devrait pourtant structurer tout le texte en faisant le lien entre les revendications portées par les travailleurs dans les luttes aujourd’hui et la prise du pouvoir. Cela tient aux ambiguïtés qui existent fondamentalement sur cette question, l’idée en particulier d’un gouvernement « au service de la population » qui s’appuierait sur les luttes, mais ne serait pas directement issu des nouvelles formes de pouvoir mises en place par le monde du travail et l’ensemble de la population dans les luttes ; et au fond une conception assez ambiguë de la « rupture avec les institutions » qui se révèle finalement assez compatible avec l’idée d’une constituante et d’une vie République tels que les défend (du moins en parole) Mélenchon. Cerise sur le gâteau : une série de considérations relatives à l’ « autogestion » destinées sans doute à flatter celles et ceux qui pensent qu’on peut s’exonérer de la nécessité de prendre le pouvoir politique, notamment dans les milieux altermondialistes. Avec un paragraphe sur les subventions qui ne peut que cautionner les compromis pour le moins inacceptables avec la « gauche de la gauche » sur cette question. Au final, on trouve vraiment de tout dans ce texte, des formules radicales et des formules plus institutionnelles, et même des formules pour contourner la question du pouvoir… C’est un peu à la carte, et tant pis si ce n’est guère cohérent ! Ce n’est pas ainsi qu’on pourra rassembler largement et construire le NPA. Car au bout du compte, on cultive surtout l’incompréhension et la déception. Nous avons besoin de rassembler oui, mais dans la clarté ! C’est le choix que nous proposons aux camarades de l’organisation.
Position du Collectif pour une tendance révolutionnaire (position 4)
Pour une analyse marxiste et une réponse ouvrière et révolutionnaire à la criseLes gouvernements de droite ou de gauche font payer la crise mondiale du capitalisme aux travailleurs : licenciements, plans d’austérité, etc. L’analyse de la crise et le programme qui en découle sont un enjeu décisif du congrès. Selon l’analyse keynésienne des réformistes, la crise serait due aux salaires trop bas. En les augmentant, on relancerait la « demande », ce qui inciterait les capitalistes à produire. On aurait à la fois un meilleur « partage des richesses » et la croissance. On sortirait de la crise sans sortir du capitalisme. C’est une illusion. Car la crise s’explique en réalité par la suraccumulation de capital : trop peu de plus-value est produite par rapport à la valeur du capital engagé. Dans le cadre du capitalisme, la hausse générale des salaires aggraverait la crise en diminuant encore le taux de profit. Mais nous revendiquons la hausse des salaires et le partage des heures de travail jusqu’à disparition du chômage, car nous partons des besoins des travailleurs, non des limites de ce système monstrueux, qui ne peut relancer réellement la croissance sans une vague de faillites et/ou une grande guerre (abaissant fortement la valeur du capital engagé et relevant donc le taux de profit), bref sans chômage de masse, baisse des salaires réels, misère, souffrances inouïes. Il est crucial que notre parti se dote d’une analyse marxiste de la crise. Or la direction sortante n’en propose aucune explication sérieuse et tend à reprendre l’analyse keynésienne en l’expliquant par l’insuffisance des salaires ; d’où un programme tendant au réformisme dans le texte « Nos réponses à la crise » des plateformes 1 et 3. Il laisse croire qu’on pourrait interdire les licenciements sans en finir avec le capitalisme, par des « punitions » contre les patrons, comme la CGT avec sa sécurité sociale professionnelle. Nous voulons au contraire que le NPA aide les travailleurs à se battre pour empêcher les licenciements, en refusant les indemnités de départ comme horizon indépassable, pour l’expropriation sous contrôle ouvrier, comme l’a fait la CGT Philips Dreux. Il conçoit le « socialisme du xxie siècle » comme une extension des coopératives et appelle à subventionner cette prétendue « économie sociale ». À cette logique réformiste, gradualiste et utopique, nous opposons la nécessité d’exproprier les grands groupes capitalistes, de s’approprier et transformer les forces productives de façon rationnelle et démocratique, pour satisfaire les besoins tout en préservant l’environnement. Il fixe l’objectif d’un « gouvernement au service de la population », donc un gouvernement qui ne serait pas celui des travailleurs eux-mêmes et n’impliquerait pas la destruction des institutions actuelles. Nous y opposons un programme de transition qui lie systématiquement les revendications immédiates à la nécessité de la prise du pouvoir par les travailleurs auto-organisés, vers le communisme.