Plus une femme est jeune, plus la question du droit à disposer de son corps est complexe. Malgré sa légalité en France, l’avortement reste un sujet tabou et plus spécifiquement dans la jeunesse. Dans cette société, les jeunes femmes qui avortent sont considérées comme irresponsables car « avec tous les moyens d’aujourd’hui… elles ne devraient pas en arriver là ». Quand on est jeune, avoir recours à l’IVG est souvent interprété comme la preuve qu’on ne sait pas se protéger, qu’on ne sait pas se servir des différents moyens de contraception, ou bien qu’on n’était pas prête pour avoir un rapport sexuel. On est ainsi doublement « coupable » d’avorter en tant que femme et en tant que jeune irresponsable. Les luttes féministes ont permis aux mineures de décider elles-mêmes d’avorter sans avoir besoin de l’accord de leurs parents (depuis 2001). Cependant, un référant majeur est toujours obligatoire et leur jeune âge renforce un regard de mépris porté sur elles et provoque un isolement. Il est important de réaffirmer que l’avortement n’est pas un crime mais bien un droit car les femmes doivent pouvoir disposer librement de leur corps.
Le droit à disposer de son corps est attaqué de toutes parts
Si en 2006, selon l’Insee, près de 85 000 femmes entre 15 et 24 ans ont avorté, il ne s’agit pas d’inconscience juvénile. Cela traduit le manque d’information et les difficultés d’accès à la contraception. Dans l’Éducation nationale, les cours d’éducation sexuelle sont trop souvent techniques, sexistes, orientés uniquement vers la reproduction (les règles, le fonctionnement du pénis…), et très éloignés des réelles préoccupations des jeunes : la question du plaisir et du désir ; comment imposer une contraception ? comment en parler ? Cette situation est exacerbée par les multiples suppressions de postes de personnel qualifié comme les infirmières et les médecins scolaires. La politique de casse du service public du gouvernement Fillon soutenu par Sarkozy, constitue une grave attaque contre les droits des femmes. Les suppressions de postes et le manque de moyens entraînent la disparition d’une politique d’éducation sexuelle et d’une réflexion plus poussée sur la contraception.
Le Planning familial joue ce rôle d’écoute anonyme, d’information et de prévention pour les jeunes et particulièrement pour les femmes. Mais récemment, lui aussi a été menacé par la politique de démantèlement des services publics et de dislocation des associations menée par le gouvernement. Grâce à une mobilisation unitaire, le gouvernement a reculé mais le Planning et son caractère féministe sont toujours remis en cause. La fermeture de nombreux centres IVG et la restructuration des hôpitaux organisées par Bachelot impose à de nombreuses femmes de faire des kilomètres pour pouvoir avorter. Pour les jeunes femmes, qui ont moins d’autonomie, c’est une galère supplémentaire. Pour avorter il faudra avoir les moyens de payer une clinique privée et/ou les transports et se battre pour une place. L’IVG devient une pratique de classe dont l’accès est facilité aux plus riches. On limite ainsi, pour les plus précaires, et donc en particulier les jeunes femmes, le droit à disposer de son corps !
Ces attaques font partie d’un retour à l’ordre moral et offrent plus d’espace aux idées réactionnaires des mouvements pro-vie qui gagnent du terrain. Pour y résister et défendre les droits des femmes, l’urgence est de se tourner vers cette nouvelle génération de jeunes en lutte qui émerge depuis quelques années.
Rosa et Anna F