Le dernier film de Jean-Luc Godard, « Film socialisme », est un ensemble de clichés et de caricatures. On se demande toujours à la fin pourquoi il a choisi ce titre.Pourquoi socialisme ? Vaste question sans doute parce que c’est dans l’air du temps et que, à défaut d’en parler, nous sommes et serons quelques imbéciles à s’être jetés dans les salles obscures pour aller chercher un message, la « vision » de Jean-Luc Godard. Quid du message ? Le néant, socialisme c’est beau sur l’affiche, ça roule sur la langue mais Godard n’avait comme dans une bonne partie de son œuvre (je suis généreux) rien à dire. Bien sûr l’ego de l’animal qui imprime ses initiales JLG sur l’affiche entre « film » et « socialisme » est omniprésent. La première minute est généreuse, le générique a des airs d’affiche, caractères rouges et blancs sur fond noir. Puis viennent les premiers mots : « L’argent est un bien public comme l’eau ». Quelle pensée, nous nageons en plein socialisme. Pour le reste, la caricature est brillante, impossible de ne pas penser à tous ces humoristes qui ont parodié Jean-Luc, qui se trouvent ici débordés sur la gauche par l’original. Des personnages hors-cadres, des dialogues déclamés sur un ton que nul être sur terre ne pourra entendre ailleurs que dans un film de Godard. Ces dialogues où une personne en premier plan balance une banalité ou autre stupidité pour que le second personnage au second plan qui regarde le premier réponde par quelque chose de tout aussi invraisemblable : c’est du Godard, certes, mais guère dans sa splendeur, une autocaricature navrante qui n’offre rien au spectateur. Beaucoup de critiques parlent de ce film, chacun y voit ce qu’il veut, du marc de café ou le test de Rorschach sont certainement préférables. Il faut tout de même reconnaître une qualité à ce film. Jean-Luc Godard a filmé la mer comme nous l’avons rarement vue. Une mer bleu pétrole souvent inquiétante, parfois faussement calme, une mer qui ponctue, chapitre le film, donnant une bouffée d’air au spectateur énervé ou impatient de voir la salle obscure s’éclairer, d’être enfin libéré de cette douloureuse séance. Dommage que ces plans marins soient gâchés systématiquement par un bruit assourdissant, le vent dans le micro évidemment sur-amplifié, genre vidéaste amateur avec son caméscope des années 1980 sur le pont d’un ferry allant en Angleterre. Le bruit de fond assourdissant est récurrent dans ce film, au beau milieu de dialogues, par une langue étrangère ou d’autres bruits inconnus, des interludes boîtes de nuit saturés de son (pourquoi pas) filmés avec un portable, en résumé vos oreilles ne seront pas non plus épargnées. Et puis, il y a ces noms de villes qui apparaissent à l’écran sans aucun rapport avec le film ni le propos et pouvant donner encore lieu à des clichés affligeants, exemple : Barcelona est illustrée par une image de quelques secondes sur un toréador, eh oui ! Pour finir et donner le dernier coup, je laisserai juste cette déclaration, une des nombreuses qui vous sont balancées dans la tronche gratuitement : « Être ou avoir... Tout irait mieux en France si on apprenait à dire avoir ». Film socialiste ? Certainement pas. Thibault Blondin