Au lendemain du 11 septembre 2001, le président Bush prononce plusieurs discours, dans lesquels va surgir un mot chargé de connotations : le mot « croisade ». L’irruption de ce vocable n’est pas fortuite : « croisade suscite comme par inadvertance un imaginaire historique et vient polariser représentations et positions ». Car les croisades ont marqué en profondeur notre imaginaire, et leur écho continue de résonner de nos jours à travers les romans historiques, les polars et le cinéma… Il suffit de songer à l’incroyable succès du Da Vinci Code de Dan Brown. C’est pour toutes ces raisons qu’il faut lire cette conférence de Barbero. Le texte conserve l’aspect de la causerie, ce qui rend la lecture très fluide et très abordable. En quatre grands chapitres, l’historien italien livre une analyse synthétique de ce qu’ont été les croisades, tout en faisant quelques rappels importants : par exemple que les croisades sont au fondement de la violence antisémite en Europe (p. 10) ; ou encore qu’elles sont le produit d’un affrontement politique particulièrement virulent entre la papauté et les différents souverains de l’époque (p. 16). Mais le chapitre le plus intéressant concerne les questions de la guerre sainte et du jihad. L’auteur montre comment ces notions évoluent dans le corpus spirituel et juridique de l’époque. Il insiste bien sur la rupture que représente cet évènement dans le christianisme, « quand commence à circuler l’idée que tuer n’est non seulement plus un péché, mais au contraire une action bénie » (p. 65). Au cœur de ces évènements émergent de grandes figures, qui sont devenus de véritables personnages de légende : Richard Cœur de Lion, Saint Louis, Saladin… À chacun, Barbero redonne sa réelle dimension, en s’attardant, en conclusion, sur les liens qui se tissèrent et sur ces hommes « venus pour conquérir et massacrer, et qui ensuite furent eux-mêmes conquis, pouvant dire d’eux-mêmes […] : nous qui autrefois étions occidentaux, et qui désormais ne le sommes plus. » Henri Clément
Champs Histoire Flammarion, 120 pages, 7 euros