Les Nouveaux Réalistes continuent à susciter un intérêt international. Ce retour à une perception différente de la réalité qui a marqué les années 1960, cette réaction à l’abstraction ambiante, néanmoins éloignée de la figuration jugée (à l’époque) « petite bourgeoise » a suscité de grandes expositions ces dernières années : Martial Raysse, Niki de Saint-Phalle, Jacques Villeglé et Raymond Hains récemment. C’est au tour de Jean Tinguely.
Artiste suisse (1925-1991), le 25e anniversaire de sa mort donne lieu aux inévitables célébrations, notamment une grande rétrospective à Düsseldorf et bientôt à Amsterdam, sans oublier ses espaces permanents à Fribourg et à Bâle.
À Paris, on peut rêver toute l’année devant la Fontaine Stravinsky réalisée en commun avec sa compagne Niki de Saint-Phalle au pied du Centre Pompidou : les machines aériennes et animées de l’un y côtoient les personnages dodus et colorés de l’autre.
Et c’est à la Galerie Vallois1 que l’on peut admirer jusqu’au 29 octobre un ensemble exceptionnel de ses sculptures et reliefs animés datant des « ’60s » des Balubas aux Radio WNYR, œuvres hétéroclites de pièces et objets métalliques divers, jouets, plumes, etc., animées par un moteur électrique et produisant parfois des sons. Assemblages d’une légèreté et d’une grâce qui semblent défier la matière, ils n’en restent pas moins un simple détournement des objets du quotidien, à l’instar des affiches lacérées par Jacques Villeglé, les accumulations d’Arman ou les objets de consommation de Martial Raysse.
Produites à une époque où, en Europe, on s’activait dans les usines autour de chaînes de production déshumanisées, les œuvres de Tinguely donnent à la machine de la poésie, de la fantaisie et même de la voix. Des œuvres emblématiques des « ’60s », où le couple iconoclaste Tinguely / Niki de Saint-Phalle dynamite le monde de l’art, lui dans l’éclatement de la machine industrielle, elle dans l’image de la femme libérée.
À voir, et à mettre en regard de la prochaine exposition des œuvres de Gilbert Peyre « l’électromécanomaniaque », à la Halle Saint-Pierre à partir du 16 octobre.
Ugo Clerico
- 1. 33 et 36, rue de Seine, Paris 6e.