Paris, Centre Pompidou, jusqu’à au 1er juillet 2024.
Brancusi est un des fondateurs de la modernité dans l’histoire de la sculpture. L’exposition du Centre Pompidou présente un ensemble très important de l’artiste. Il vous reste un mois pour la voir. Les œuvres présentées sont souvent exceptionnelles, mais l’exposition souffre d’un syndrome qui semble récurrent à Beaubourg : un art du contresens quant à la perception des œuvres et à leur exposition, voire un art de les mettre à mal.
La scénographie en question
Cela fut le cas pour plusieurs expositions du Centre ces dernières années : celle d’Hervé Télémaque, confiné dans un espace qui comprimait l’œuvre, ou pour Shirley Jaffe dont l’exposition était reléguée dans un espace qui démentait l’estime et l’importance que le musée déclarait lui porter, plaçant le commissaire dans une situation intenable. On a pu voir ce genre de désastre aussi avec l’exposition de Léon Ferrari en 2022, dont la scénographie était tout simplement affligeante.
Cela concerna certaines expositions collectives, comme « Préhistoire, une énigme moderne » en 2019, où on profita de la méconnaissance du public pour faire n’importe quoi et présenter les œuvres n’importe comment, oblitérant des artistes essentiels (pour Supports/Surfaces une petite sérigraphie perdue dans un coin !), en incluant d’autres dont la présence ne se justifiait pas, abandonnant certaines dans ce qui ressemblait plus à une réserve de la Samaritaine qu’à une salle d’exposition (la salle avec les œuvres de Barbara Hepworth). On retrouva les mêmes incohérences dans « / Allemagne / Années 1920 / Nouvelle Objectivité / August Sander / » en 2022.
Des œuvres magistrales
L’artiste Dominique Ange a parfaitement raison de considérer que « présenter les trois grands coqs de Brancusi en plâtre posés sur un présentoir des galeries Lafayette, plutôt que les poser à même le sol en début d’exposition est “une trahison” » et que « la suite de l’exposition développe ce parti pris esthétique contraire à l’esprit des œuvres », qu’elle est « en contradiction avec le commentaire des cartels. […] La rétrospective Brancusi est une mauvaise exposition réalisée avec des œuvres magistrales. C’est mieux que le contraire ». Rien à ajouter ! Il est des fois où il faut aller voir une exposition malgré ses commissaires !
Philippe Cyroulnik