Raw vision, Outsider art fair, dans les galeries du monde entier et les plus belles adresses spécialisées : l’art brut… Et même au Centre hospitalier Saint-Anne !
Le concept d’art brut imaginé par Jean Dubuffet désigne les productions spontanées – peintures, sculptures, autres… –sans normes esthétiques, de non-professionnels, malades psychiatriques, prisonniers, enfants. Ce qui signifie entre autres que l’on ne peut pas s’autodésigner comme artiste d’art brut.Le centre d’études de l’expression de l’hôpital psychiatrique Sainte-Anne resitue ces œuvres dans leur contexte d’origine et les sort avec bonheur des circuits marchands. La collection d’Alain Bourdonnais, galeriste initié à l’art brut par Dubuffet, est maintenant visible dans le musée de la Fabuloserie à Dicy (89), où est aussi exposé l’extraordinaire Manège de Petit Pierre . Loin des lieux marchands, sans rien enlever à tout l’intérêt de Raw Vision qu’elle peut compléter, cette exposition permet de se rapprocher de l’immense émotion que procurent ces œuvres qui trahissent mieux que des paroles les obsessions et les douleurs de leurs auteurs.Hors les murs de l’hôpital mais le longeant, rue Cabanis, est exposée une des plus stupéfiantes œuvres d’art brut. Elle fait malheureusement la pub d’un mécène, encore une récupération géniale mettant en évidence les lacunes de la politique culturelle publique. Il s’agit du Plancher de Jeannot (1). Jeannot était un jeune homme très fragile et perturbé vivant complètement isolé dans une ferme du Béarn après avoir combattu en Algérie. Après avoir perdu violemment ses parents, il s’enferma dans sa folie et grava sur trois grands panneaux de plancher ses hallucinations, dont le thème central est « c’est la religion qui a fait tous ces crimes ». Il se laissa mourir de faim à 33 ans. Comme on dit dans les guides, « ça vaut le voyage »…
Catherine Segala
1 – Article sur le Plancher de Jeannot : http://paris4philo.over-blog.org/article-11272373.html
« Un autre regard. L’art hors les normes d’Alain Bourdonnais dans les murs de la collection Sainte-Anne », jusqu’au 16 février, Centre hospitalier Sainte-Anne, rue Cabanis, Paris 14e.