Publié le Mardi 11 novembre 2025 à 13h59.

Sahara Occidental : à l’ONU, un vote place l’occupation marocaine en position de force

Le dernier vote du Conseil de sécurité sur le Sahara Occidental marque un tournant préoccupant. En présentant le plan d’autonomie marocain comme « solution réaliste », l’ONU, sous la pression des puissances impérialistes, favorise le régime colonial marocain dans les négociations qui l’oppose au Front Polisario.

Ce geste diplomatique, passé presque inaperçu, est contradictoire avec l’engagement historique de l’ONU en faveur d’un référendum d’autodétermination pour le peuple sahraoui – engagement en faveur d’un référendum d’autodétermination qui, paradoxalement, a été réaffirmé lors de ce même vote.

Une promesse vieille de 30 ans transformée en impasse 

Depuis 1991, la Minurso (Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental) devait organiser un référendum clair, avec l’indépendance comme option. C’était la condition du cessez-le-feu. Le droit international était sans ambiguïté : le Sahara Occidental est un territoire non autonome occupé par le Maroc, une question de décolonisation, et son peuple doit choisir son avenir.

Mais ce référendum n’a jamais vu le jour. Le Maroc a multiplié les manœuvres pour contrôler la liste électorale, refuser l’option de l’indépendance et imposer ses propres « solutions ». Résultat : trois décennies de blocage, de rapports enterrés et de compromis jamais tenus. La Minurso, privée même de mandat sur les droits humains, est devenue un simple outil de gestion du statu quo.

Un virage impérialiste clair

La nouvelle résolution franchit une ligne. Elle prolonge encore la Minurso jusqu’en 2026, mais l’empêche de mener sa mission à bien. Surtout, elle qualifie le plan marocain de « solution la plus réaliste ». C’est un changement stratégique : l’ONU passe d’un engagement formel à l’autodétermination à une légitimation tacite de l’occupation du Sahara occidental par le Maroc.

Derrière ce virage, on retrouve les mêmes puissances impérialistes. Les États-Unis ont déjà reconnu la souveraineté marocaine en 2020. La France, partenaire militaire et politique de Rabat, défend sa ligne depuis longtemps. Plusieurs États européens s’alignent à leur tour. Le Maroc est devenu un pilier pour le contrôle des migrations vers l’Europe, un relais économique sur le continent africain et un acteur clé de la normalisation régionale avec Israël. Autant de raisons pour les grandes puissances de sacrifier le droit des Sahraouis.

D’un point de vue marxiste, rien d’étonnant : l’impérialisme ne mise plus sur les indépendances formelles comme dans les années 1960. Il préfère des « autonomies » sous souveraineté qui permettent de stabiliser un territoire, d’en exploiter les ressources et de verrouiller les alliances, tout en vidant la libération nationale de son contenu. Un compromis néocolonial, repeint aux couleurs du « réalisme ».

Les sahraouis paient le prix du virage 

Pour les Sahraouis, ce vote signifie une chose : l’autodétermination n’est plus la priorité absolue de l’ONU. Dans les zones occupées, le joug marocain étouffe la population, qui vit entre répression, expulsions, surveillance policière et pillage des ressources. Dans les camps de réfugiés, des centaines de milliers de Sahraouis sont contraints de vivre dans un pays étranger en attendant désespérément la décolonisation de leurs terres. La « solution réaliste » promue par l’ONU vise à normaliser cette situation et à transformer le Sahara Occidental en zone d’exploitation marocaine, adossée aux intérêts occidentaux.

Radu Varl