Film iranien, 2h39, en salles, sortie en VOD le 2 décembre 2022.
Le précédent film de Saed Roustaee, La loi de Téhéran, débutait par une scène où l’on voyait des dizaines de policiers pourchasser impitoyablement des fumeurs de crack dans un quartier misérable. Dans Leila et des frères, on assiste, dans un des premiers plans du film, à l’intervention musclée d’une milice patronale en uniforme qui matraque les ouvriers d’une usine pour qu’ils évacuent immédiatement sans que leurs salaires soient payés. Parmi les expulsés, Alireza, pressé de s’enfuir alors que d’autres résistent et manifestent.
Plongée dans la société iranienne
Alireza, désormais chômeur, est un des quatre frères de Leila. Celle-ci, encore jeune, a dédié sa vie à ses parents et ses quatre frères. La famille croule sous les dettes tandis que les boulots précaires des enfants permettent tout juste de vivoter. Afin de les sortir de cette situation, une occasion se présente : acheter une boutique pour lancer une petite affaire. Chacun y met ses économies, mais ce n’est pas suffisant. Au même moment et à la surprise de tous, leur père Esmail promet une importante somme d’argent à sa communauté familiale, dont d’autres membres sont plus riches que lui et l’ont toujours méprisé, afin d’en devenir le nouveau parrain, une haute distinction de la tradition persane. Peu à peu, dans ce contexte, la famille se déchire tandis que toutes ses difficultés sont accrues par l’effondrement de la monnaie iranienne et la flambée des prix consécutives aux décisions de Trump de renforcement de l’embargo contre l’Iran.
Le film de Roustaee brasse une multitude de problèmes. Le père est un tyran mais le respect envers lui perdure chez les frères. Les femmes sont enserrées dans une société patriarcale et hypocrite. Ceux d’en bas, même s’ils ne sont parmi les plus pauvres (la famille de Leila relève plutôt d’une classe moyenne déchue), sont dans la précarité et doivent recourir à des expédients. Quant aux riches, ils s’en tirent quels que soient les aléas économiques.
Alireza, pour toucher trois mois de salaire, sera sommé avec les autres ouvriers de signer un papier où il reconnaitrait avoir reçu l’intégralité de ce qu’on lui doit (une année). Des femmes visiblement riches et bien habillées montent lentement un escalier sur les marches duquel les frères se sont assis. Ainsi va l’Iran dans ce film qui s’étire un peu trop par moment (mais contient des scènes magnifiques, notamment celle d’un mariage bourgeois) sans la vigueur de La loi de Téhéran, mais qui mérite d’être vu.