C’est une mobilisation de la jeunesse qui a servi de détonateur à un mouvement bien plus vaste, dont la forte tonalité antigouvernementale ébranle tout le cadre politique. Pour en comprendre les ressorts, les caractéristiques et aussi certaines difficultés, nous nous sommes entretenus avec deux camarades qui figurent parmi les responsables du secteur jeune du NPA.
Pour la première fois, un secteur de la jeunesse a pris l’initiative d’une mobilisation contre un projet gouvernemental qui concerne l’ensemble des salariés, toute la société. Dans le passé, le principal moteur de ses luttes était plutôt la défense de ses conditions d’existence et d’étude immédiates, comme on l’a aussi vu récemment dans les grands mouvements jeunes d’autres pays (Grande-Bretagne, Chili, Québec…). A quoi attribuer ce changement ?
La mobilisation dans la jeunesse est partie pour de nombreuses raisons. La première est celle d’une colère générale d’une frange tout de même importante de la jeunesse, qui en amont de la mobilisation se posait déjà la question de comment résister face aux attaques antisociales du gouvernement, et même plus largement contre la marche de cette société. La seconde est qu’aujourd’hui plus de 50 % des étudiants sont salariés à côté de leurs études, au cours de l’année et pendant les vacances. Pour beaucoup, cette loi est la matérialisation de leur quotidien au boulot que cela soit chez McDo, dans un supermarché, la restauration et même en tant qu’assistant d’éducation…
Le fait d’être de la main-d’œuvre précaire et jetable à tout moment est un quotidien que nous sommes beaucoup à vivre. Alors que jusqu’ici on nous expliquait que la précarité quand on est jeune c’était une transition vers la possibilité d’avoir un emploi stable après, la loi travail nous promet d’étendre à vie ce qu’on vit déjà au quotidien. De plus, le mythe qu’on réussira nos études et que nous obtiendrons des postes élevés, où la question du salariat ou de l’exploitation se posent différemment, est complètement défait. Nous savons qu’au vu de la situation du chômage, de la réalité de nos diplômes et du « marché » de l’emploi, nous serons en très grande majorité des travailleurs comme les autres que cela soit avec un BTS, une licence, un master ou même un doctorat. Nous comprenons que la précarité est le lot commun qui attend toute la jeunesse.
Le mouvement a démarré dans la jeunesse, mais semble avoir du mal à s’y enraciner. A la fois par le nombre d’universités et de lycées mobilisés, et par celui des jeunes qui en leur sein participent aux actions et mobilisations, le mouvement reste à ce jour minoritaire, alors même que le rejet de la loi El Khomri est très largement partagé. Comment expliquez-vous cette contradiction, et comment la dépasser ?
Cette contradiction était déjà présente ces dernières années : une colère qui montait dans la jeunesse, avec une volonté de trouver des solutions que cela soit contre les grands projets inutiles, comme NDDL ou contre les expulsions, les violences policières, les coupes budgétaires…. Mais qui ne se traduisait que rarement par une explosion d’ampleur en brassant une frange significative de la jeunesse. Cela fait maintenant six ans que nous n’avons pas connu une mobilisation réelle de la jeunesse avec des grèves, des assemblées générales, des coordinations régionales et nationales. C’est donc une génération qui n’a pas d’expérience de lutte massive et qui peut avoir tendance à rechercher des solutions individuelles aux questions qu’elle se pose.
Pourtant, il faut voir que la taille des AG et l’enracinement de la mobilisation dépend beaucoup des lieux. Certaines universités ont organisé des AG dès le début plus fortes que celles de 2010, d’autres ont stagné très rapidement. Sur les lycées, la mobilisation n’est pas encore réellement partie. Par contre le niveau d’organisation des quelques lycées qui sont descendus dans la rue est assez important avec des assemblées générales, des coordinations locales, régionales et nationales…Alors que ces expériences d’organisation avaient été quasi inexistantes lors des mobilisations contre les expulsions ou les violences policières.
Même si la participation aux AG n’atteint pas les chiffres que nous pourrions attendre au vu du rejet général de la loi, il faut noter que le nombre d’étudiants en manifestation par université est souvent bien plus important que le chiffre de présents aux AG. La volonté d’action concrète est très présente, ce qui se ressent par des comités de mobilisation plus importants qu’en 2010. Il est possible de faire des AG à 250 et d’avoir un comité de mobilisation de 100 étudiants qui veulent militer, s’adresser aux autres étudiants, aux salariés… Il ne faut par ailleurs pas se leurrer sur le caractère majoritaire ou minoritaire de la mobilisation. Tous les mouvements dans la jeunesse ont été minoritaires, même le CPE : en 2011, les statistiques parlaient de huit millions de jeunes entre 15 et 25 ans. La question est surtout : est ce qu’une part significative de la jeunesse s’est emparée du mouvement et de ses outils d’organisation que sont les AG, les comités de mobilisation… Ce qui n’est actuellement pas le cas à une grande échelle.
Les chiffres de participation aux AG dépendent pour beaucoup de ce que l’on peut nommer le facteur subjectif, c’est-à-dire le nombre de militants présents avant le déclenchement de la mobilisation. C’est un facteur qui permet un changement assez rapide de l’ambiance sur les facs. Les universités avec un nombre important de jeunes organisés ont ainsi tout de suite décollé, comme à Paris 8 ou même Paris 1. La situation est la même sur les lycées. Ainsi, le recul général des organisations dans les lycées est un des facteurs qui explique que l’explosion soit plus lente. Il s’agit d’une tâche déterminante pour la rentrée des vacances, que cela soit pour les comités de mobilisation ou pour les militants révolutionnaires.
Enfin, la taille importante des comités de mobilisation affecte des tâches particulières à ces derniers. Les militants de la grève ont une compréhension assez claire de leur rôle d’entraînement des autres jeunes, étudiants ou lycéens, mais aussi des salariés. Si ces groupes continuent à lier le travail de discussion et de conviction sur la possibilité de gagner avec une stratégie claire – celle de la grève reconductible et de la jonction avec les travailleurs – ils peuvent donner confiance à une frange significative pour rejoindre le mouvement.
Que pouvez-vous nous dire des caractéristiques – aspirations, préoccupations, discussions… – des secteurs qui aujourd’hui se mobilisent ?
Dans le début de la mobilisation nous avons vu apparaître de nouveaux militants, souvent en première année, qui n’ont eu que peu d’expérience politique auparavant voire aucune, mais aussi d’autres qui se sont mobilisés contre les violences policières, les expulsions, NDDL… et qui y voient la possibilité d’une revanche contre ce gouvernement. L’aspiration est à la fois d’infliger une défaite au gouvernement et d’exprimer cette rage accumulée contre lui depuis plusieurs années. Certains ont voté PS et y voient le moyen de refuser sa politique concrètement.
Le point commun à toutes ces franges qui se mobilisent est la recherche de réponses aux questions qui ont traversé certaines couches de la jeunesse cette dernière année : les migrants, l’état d’urgence, les affaires politiques, etc., et quelle stratégie, quelle politique face à ce gouvernement et cette société pourrie jusqu’à la moelle ? La mobilisation est apparue comme un moyen de répondre à cela, en lui donnant un caractère directement assez politique : contre le fait de perdre sa vie à la gagner, les patrons rois, la nécessité de partager le temps de travail et d’en finir avec la dictature patronale et du gouvernement sur nos vies…
Une des discussions principales, même si elle apparaît secondaire dans le cadre de la mobilisation, est la question du mode d’organisation de la lutte autour des assemblées générales, parfois remis en cause pour son aspect supposément trop parlementaire ou trop long. Cette situation s’explique aussi, dans les universités où les AG n’ont pas dépassé les 250 ou 500 personnes, par le fait que peu d’étudiant s’emparaient de la mobilisation au-delà du comité de mobilisation. Peu ont pris la parole, se sont posé les questions et ont cherché à faire de ces outils les organisateurs de la mobilisation.
La seconde discussion a montré malgré tout la maturité des gens mobilisés en pointant l’insuffisance de la seule mobilisation de la jeunesse, dont la grève ne bloque pas l’économie. Très rapidement, la réponse trouvée un peu partout a été de se tourner vers les travailleurs et les secteurs capables de paralyser l’économie rapidement : cheminots, automobile… Des passages et des diffusions de tracts dans les gares ou dans les usines automobiles ont été régulièrement organisés par les universités mobilisées. Sous cet aspect, la mobilisation contre la loi travail a ainsi dépassé la mobilisation des retraites, où la grève étudiante semblait s’auto-suffire et où les étudiants ne cherchaient pas largement à utiliser les forces militantes de la jeunesse pour s’adresser aux travailleurs.
Une des préoccupations a aussi été de se démarquer des organisations politiques et syndicales. La nécessité de l’auto-organisation, et donc des coordinations régionales et nationales, a ainsi été directement au cœur de la mobilisation. Une équipe de porte-parole de la coordination nationale étudiante a ainsi été désignée dès la deuxième coordination. Pourtant, il s’agit d’un des points de clivage historiques entre les courants autonomes, l’UNEF, la JC et nous.
On a souvent eu l’impression que ce qui domine chez les jeunes est l’indifférence à l’égard de la politique ou son rejet. Sans parler de certains sondages qui ont pu mettre en avant un soutien important des jeunes pour le FN. Pourtant, les organisations politiques et « syndicales » de jeunes (ces dernières, très liées à des courants du Parti socialiste) ont joué un rôle décisif pour lancer les premières initiatives…
Ce qu’il faut noter en premier lieu, c’est la colère qui montait et qu’une série de militants sentaient que la question du code du travail pouvait être la goutte d’eau qui ferait déborder le vase. Peu avant les vacances de février, les tables sur la réforme El Khomri étaient des succès important, les étudiants et les lycéens s’arrêtaient et discutaient déjà de comment s’y opposer. Cette colère s’est exprimée par une pétition qui a rapidement explosé les records, mais il fallait encore le matérialiser dans la rue et par la grève. Dans ce cadre a émergé une date sur facebook, celle du 9 mars sur laquelle nous avons décidé de nous appuyer.
Au niveau des jeunes du NPA, on a décidé de convoquer une réunion unitaire des organisations de jeunesse, syndicales et politiques, pour discuter concrètement de la préparation d’un affrontement d’ampleur. Cette réunion a été reprise par toutes les organisations de jeunesse, du MJS à AL. Dans ce cadre on a défendu des journées de grève le 9 mars mais aussi le 17 mars, car on sentait la vapeur et le bouillonnement ambiant. Le front unique ainsi créé s’est mis en branle assez rapidement avec des AG convoquées sur les universités, des distributions sur les lycées… permettant d’être le détonateur pour lancer la mobilisation. Même s’il y a un rejet réel des organisations, ou du moins des organisations traditionnelles, la situation faisait que les étudiants répondaient présent et on notait un changement d’ambiance dans les distributions de tracts, les interventions dans les cours ou les discussions individuelles.
Dans ce cadre, les clivages restaient présents entre organisations sur la question de la place de l’auto-organisation. Les organisations réformistes ont poussé dans un premier temps à ne pas forcément matérialiser cela dans des cortèges inter-fac, mais le fait qu’à la première manifestation les cortèges auto-organisés étaient plus nombreux que ceux des organisations a rapidement tranché la question.
Dans ce cadre, les courants autonomes ont joué un rôle différent en fonction des endroits, au vu des sensibilités présentes : parfois très gauchistes, avec des volontés de blocage peu importe la taille des AG, la volonté d’en découdre avec la police, mais aussi pour certains la compréhension de chercher à convaincre largement de la nécessité de se mobiliser. Le MILI, dont on entend de plus en plus parler, a lui une politique très particulière et surfe sur l’habitude des lycéens parisiens de se regrouper à 11 heures à Nation pour manifester, qui est apparue avec le mouvement Khatchik et Leonarda de la fin 2013. Leur politique a été d’en faire des manifestations sauvages où l’objectif était de casser des banques et de s’en prendre aux flics. En plus des problèmes politiques que cela pose, ils ont mené une série de jeunes dans des manifestations lourdement réprimées. Leur agressivité envers les organisations n’a en aucun cas aidé à résoudre ces problèmes, ou du moins à trouver des solutions de compromis quand on y était présent.
Ce qui par-dessus tout terrorise le gouvernement est la perspective d’une irruption – comme en 2006 contre le CPE – de la jeunesse lycéenne. Pour l’instant, un tel phénomène ne s’est pas produit. Quels sont les facteurs qui bloquent aujourd’hui un engagement plus massif ?
Ce qui bloque ce processus, c’est en premier lieu le recul de l’intervention des organisations sur les lycées, que cela soit de la part des organisations traditionnelles mais aussi des organisations révolutionnaires, par rapport à 2006. Cette situation est malgré tout en train de s’inverser par le biais de l’intervention directe du NPA dans certains endroits qui étaient devenus des déserts politiques, mais aussi par le biais des militants de la mobilisation chez les étudiants.
Bien entendu, les réflexes lycéens ne sont pas les mêmes. Avant 2006, il y avait eu une mobilisation lycéenne massive en 2005 avec des établissements en grève partout en France et des manifestations de rue très importantes. Aujourd’hui, les lycées n’ont pas connu de telles luttes depuis 2010, donc les lycéens présents dans les établissements n’ont presque aucun réflexe de mobilisation. Ceux qui ont une telle expérience posent hélas, parfois, le blocage comme seul et unique moyen de manifester, ce qui ouvre la voie à une répression administrative et policière plus rapide.
Pour autant, il faut le dire clairement : la situation sur les lycées est bouillonnante. Il y a en ce moment des débrayages dans des lycées qui ne s’étaient pas encore mobilisés, que ce soit avant le 31 mars mais aussi pendant le mouvement Khatchik et Leonarda ou celui contre les violences policières. Le problème devant nous est de faire en sorte qu’il y ait une jonction entre les lycées mobilisés dès le début, souvent des centres-villes ou de Paris, et les lycées de banlieue qui ont commencé à entrer dans la danse tardivement. Face à une pression importante de la part des directions des lycées ainsi que des flics, il est clair que l’intervention de militants extérieurs est un facteur crucial pour donner l’impulsion mais aussi apporter l’aide nécessaire pour faire face à la répression.
La répression policière, particulièrement forte et violente, et évidemment commanditée par l’Etat, est un élément central auquel les mobilisations jeunes sont aujourd’hui confrontées. Comment l’analysez-vous, quels sont ses effets et commencez pensez-vous pouvoir y faire face ?
La répression est particulièrement violente dans cette mobilisation. Au début, elle était menée à une échelle variable : sur Paris, elle touchait surtout les franges autonomes qui cherchaient à s’en prendre directement à la police et aux banques, autour des manifestations du matin à Nation ; en province, elle a été directement très importante avec des interventions policières sur les lycées, les universités, et même des tentatives d’arrêter les manifestations avant leur fin.
Cette répression s’explique par deux facteurs. Le premier est la peur du gouvernement, qui sent une colère latente et grandissante dans la population et qui ne souhaite pas voir la jeunesse descendre dans la rue massivement et être capable d’entraîner d’autres secteurs. Pour lui, il faut donc décourager et réprimer la jeunesse. C’est pour cela que le nombre de gardes à vue a explosé. Les personnes arrêtées sont majoritairement mises en garde à vue et passent devant le procureur pour être convoquées, soit pour un procès ultérieur soit pour un rappel à la loi. La sanction judiciaire est quasi automatique dans le cadre de ce mouvement, que ce soit pour avoir manifesté, pour avoir bloqué son bahut, ou même pour avoir organisé un collage sur son université comme à Paris 3. Le choix fait est donc de frapper fort mais aussi de s’assurer qu’il y ait des poursuites judiciaires pour freiner les militants de la mobilisation. D’ailleurs, un stade a été franchi avec la destruction du local de la CNT à Lille par la police suite à une manifestation. Ils ont peur et ils feront tout pour tenter de calmer nos ardeurs.
L’autre élément est lié au contexte de tension ouvert depuis la mise en place de l’état d’urgence. Les flics sont en tension permanente et se croient tout permis, alors ils continuent dans cette optique. Il n’est pas rare de voir des flics agir de leur propre chef pour frapper des manifestants, ou des CRS bloquer une manifestation sans raison comme le 31 mars à Paris. Le gouvernement joue la tension pour essayer de décourager ceux qui hésitent à aller en manifestation, mais aussi pour créer une division entre « gentil » manifestant et « casseur ». Pour nous, il est clair qu’aujourd’hui notre mode d’action n’est pas de casser des banques, par contre il ne faut pas reculer face à la police et si celle-ci bloque le trajet, il est nécessaire d’assumer de passer et d’enfoncer leur ligne.
Cette situation a ouvert une discussion dans le mouvement. Le niveau de répression a posé concrètement la question des services d’ordre et de l’auto-défense des manifestants contre la police. Bien entendu, cette situation ne se règle pas en un jour ni même une semaine. Quand on voit ce qu’il s’est passé à Paris le 14 avril, où la manifestation a été arrêtée à Bastille par quelques grenades lacrymo et de désencerclement… Il est nécessaire de donner confiance pour rester en cortège et en chaînes, mais c’est une tâche de conviction qui peut prendre quelque temps. On ne peut pas demander à des jeunes en une semaine de constituer des cortèges structurés en chaînes et de braver les matraques et les gaz. Mais la discussion est largement ouverte sur la nécessité de tenir tête à l’Etat et la police. Nous essayons de mettre en place des SO interfacs partout où c’est possible en formant les militants de la grève, en donnant des consignes de sécurité, en signalant la nécessité quand il y a un problème de se regrouper et de faire attention aux gens autour de soi en cas de tentative d’arrestation.
Quand on voit la motion votée par les dockers du Havre, qui explique que si la police touche à un seul cheveu d’un jeune, le port sera bloqué, on se rend bien compte que la meilleure réponse face à la répression reste notre stratégie globale de jonction avec les travailleurs, et d’être nombreux. La position des dockers du Havre aurait dû être reprise partout, chez les enseignants pour les lycéens réprimés mais aussi par des secteurs du monde du travail. Le samedi 9 avril à Paris, les flics ont tenté des provocations une fois les manifestants arrivés à Nation. Leur problème a été de ne plus se retrouver confrontés aux 200 manifestants habituels, qui sont prêts à en découdre, mais à bien plus de 1000 manifestants qui restaient groupés et avançaient face aux lignes de CRS.
Face aux poursuites judiciaires, la solution réside dans la solidarité et la nécessité de défendre l’aspect politique de ces arrestations. Il faut organiser des rassemblements centraux contre la répression, pour la relaxe de tous les manifestants poursuivis en justice. Cette tâche doit être prise en charge par la mobilisation mais aussi par les organisations syndicales et politiques. Dans ce cadre, il ne faut pas reprendre la division que souhaite mettre en place le gouvernement entre « gentil » et « méchant » manifestant. La première violence est celle de cette société, de l’Etat et des flics. D’ailleurs, les provocations et les interventions des flics en civils sont de plus en plus nombreuses ; souvent, ce sont eux qui commencent à caillasser leurs collègues ou à casser des voitures… Ils veulent créer la tension, il faut y répondre et montrer que nous sommes prêts à faire face.
La convergence interprofessionnelle est l’une des clés du mouvement, pourtant elle est moins développée qu’en d’autres occasions, y compris lors du mouvement de 2010 en défense des retraites. Des secteurs mobilisés dans la jeunesse ont pris des initiatives dans ce sens…
Comme dit précédemment, la convergence a été un axe central dès le début. Les visites à des cheminots, aux hospitaliers, aux postiers ou à PSA ont été une politique prise en charge très tôt par la mobilisation. Le lien avec les travailleurs est beaucoup plus pris en charge par la mobilisation étudiante qu’en 2010 car nous étions cette fois les premiers mobilisés et nous devions entraîner les salariés avec nous. En 2010, les jeunes se mobilisaient directement aux côtés des travailleurs avec des appels à la grève les mêmes jours… Il n’y avait pas eu de date spécifique jeune et la mobilisation était partie au même moment. Les tâches et les questions ne sont pas les mêmes.
Sur Nuit Debout, nous avons essayé d’y intervenir assez rapidement avec la mise en place d’un stand de la coordination étudiante. Nous avons rencontré un problème réel avec un décalage important entre les différents milieux mobilisés. Certains voient Nuit Debout comme un OVNI et ne comprennent pas trop ce qu’il s’y passe concrètement, d’autant plus que le rythme de la mobilisation ne permet pas d’être présent tous les soirs jusqu’à pas d’heure. Pour d’autres, cela a été un point de ralliement naturel pour continuer la mobilisation et centraliser les activités. Du coup, on a essayé de lier tout cela avec des actions pour s’adresser aux travailleurs comme à Saint-Lazare, Austerlitz ou Guyancourt. Le lien ne se fait pas automatiquement, car les questions qui se posent ne sont pas les mêmes. Nous sommes dans une mobilisation contre la loi travail et cherchons à l’élargir et à gagner, sur Nuit Debout les questions ne se posent pas toujours de la même manière.