Fin janvier, Sarkozy ironisait devant les parlementaires UMP au sujet de son choix d’être le président-candidat de l’austérité et de la TVA sociale : « Pour les uns je me suiciderais. Eh bien, je suis le suicidé le plus en forme de France ! » La fuite en avant suppose les rodomontades et le bluff jusqu’à... la chute. On voit mal comment le non-candidat pourrait passer le cap de l’élection présidentielle. Certains députés UMP sont, semble-t-il, taraudés par le doute... Étrange campagne en effet que celle de Sarkozy qui espère peut-être conjurer le sort en n’annonçant pas sa candidature, « de toute façon, l’attente crée le désir » (!), tout en décidant une série de mesures dont la mise en œuvre ne se ferait qu’une fois l’élection présidentielle passée...
Étrange discours aussi que celui qui se réfère en permanence à l’Allemagne, sa chancelière, ses syndicats, ses socialistes comme Schrœder, sa compétitivité.., comme s’il cherchait ailleurs la force qui lui manque.
Sentant le sol se dérober sous ses pieds, Nicolas le petit n’en continue pas moins sa sinistre besogne. Après avoir convoqué les directions syndicales au « sommet social » du 18 janvier pour annoncer une première série d’attaques, le 29 janvier, sur 9 chaînes de télévision, interrogé par des journalistes serviles, il a continué la charge avec ses deux principales attaques : la TVA sociale et les accords de compétitivité négociés entreprise par entreprise. Les deux visent à faire brutalement baisser le « coût du travail », c’est-à-dire le salaire direct ou indirect.
La première a concentré le mécontentement jusque dans les rangs des députés UMP mais la seconde est encore plus dure et perverse. Elle permettra aux patrons, sans attendre, dès ce mois de février, de négocier entreprise par entreprise des accords sur le temps de travail et les salaires en fonction des seuls besoins de l’entreprise, c’est-à-dire des patrons et des gros actionnaires. La porte ouverte à tous les chantages, une remise en cause du droit du travail qui permet de réaliser des accords locaux moins protecteurs pour les salariés que ce permet le droit du travail en privant ces derniers de toute possibilité de recours.
Il a fallu attendre le meeting de la CGT sur les retraites, le 31 janvier, au Zénith à Paris, pour entendre, du point de vue syndical, une condamnation claire de cette politique. Bernard Thibault a qualifié d’« arnaque » le transfert d’une partie des charges patronales sur la TVA. Concernant les négociations sur la compétitivité-emploi, il a affirmé que la CGT « ne va pas collaborer à cette opération de sabotage du droit social et appelé à préparer une puissante mobilisation de toutes les professions le 29 février prochain pour dire non à l’austérité » en souhaitant créer les conditions d’une mobilisation « unitaire » avec d’autres syndicats. Certes la politique de la direction de la CGT ne veut pas l’affrontement et s’inscrit dans un soutien à la gauche libérale et antilibérale.
Mais par-delà les calculs électoraux, l’initiative annoncée par Bernard Thibault peut être le point de départ d’une bataille unitaire qui devrait réunir « syndicats, partis politiques et associations » comme l’a déclaré Philippe Poutou. « Il faut qu’on organise ensemble une bataille politique avant l’élection pour empêcher les dernières attaques de Sarkozy [...] il faut une lutte d’ensemble, une grève générale », a-t-il affirmé. Oui, il faut mettre un coup d’arrêt à l’offensive engagée par Sarkozy et le Medef contre les travailleurs et toute la population. La victoire des ouvrières de Lejaby est bien la démonstration que le monde du travail a les moyens politiques d’agir.
Christine Lagarde déclarait, elle-même, peu avant, s’adressant aux dirigeants de l’Union européenne : « il y a une chose que nous devons tous comprendre : c’est que nous nous trouvons aujourd’hui à un tournant décisif. Il ne s’agit pas de sauver un pays ou une région. Il s’agit d’empêcher que le monde ne se laisse happer par une spirale de dégradation économique ». Certes, mais ce n’est pas du côté du FMI ou de la BCE que viendront les réponses. Ils sont responsables de cette « spirale de dégradation économique » et, faut-il ajouter, sociale et démocratique. La réponse ne peut venir que des travailleurs et de la population pour imposer un plan d’urgence sociale, démocratique, écologique qui implique une annulation de la dette et la mise sous tutelle des banques, leur expropriation pour créer un service public bancaire.
Yvan Lemaitre