Nul besoin d’attendre la décision du Conseil constitutionnel le 25 janvier pour savoir que la loi votée le 19 décembre est discriminatoire et instaure une rupture politique sans égale.
La loi prévoit que les travailleurEs seront soumis à l’arbitraire le plus total, puisque les préfets auront un pouvoir discrétionnaire de régularisation des travailleurEs sans-papiers dans les métiers dits « en tension ». Un titre de séjour d’un an sera délivré au cas par cas, à condition d’avoir résidé en France pendant au moins trois ans et exercé une activité salariée durant au moins 12 mois sur les 24 derniers. Une « expérimentation » qui s’appliquerait jusqu’à la fin 2026.
Malgré leur inconstitutionnalité, des quotas afin de « plafonner pour les trois années à venir » le nombre d’étrangerEs admis sur le territoire (hors demandeurEs d’asile) seraient instaurés. Les étudiantEs étrangers devront verser une caution pour recevoir un titre de séjour.
Principe de solidarité attaqué
La loi a non seulement été votée avec les voix du RN, mais elle reprend les principes xénophobes de la politique sociale du parti des Le Pen et remet en cause aussi les principes de la Sécurité sociale.
Les prestations sociales non contributives, en théorie non soumises au versement préalable de cotisations et reposant sur un principe de solidarité (et non sur une logique d’assurances), comme les allocations familiales, seront versées de manière beaucoup plus restrictive.
Ainsi, les allocations familiales, l’aide au logement (APL), la compensation du handicap, accessibles à partir de six mois de résidence en France jusqu’ici, seront conditionnées à cinq ans de résidence pour les étrangerEs qui ne travaillent pas et deux ans et demi pour celleux qui travaillent. Élisabeth Borne a présenté un compromis : conditionner le versement de l’APL à trois mois pour ceux qui travaillent !
Il s’agit donc de mettre en place des périodes d’exclusion pour l’accès aux aides au logement et aux allocations familiales, comme en rêvait le Rassemblement national.
Cotiser, percevoir
Dans une tribune parue le 3 janvier, Elvire Guillaud et Michaël Zemmour, économistes, rappelaient cette évidence : « en introduisant une restriction liée à la nationalité sur l’accès à une prestation de sécurité sociale, il rompt avec les principes historiques de celle-ci, instaurant un lien direct entre cotisation et affiliation ».
En attaquant le principe de l’ordonnance du 4 octobre 1945 qui institue dans son article premier « une organisation de la Sécurité sociale destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent », c’est à la solidarité de touTEs travailleurEs que la loi s’en prend.
Et pour cause, le RN comme les macronistes roule pour le système capitaliste, son ordre réactionnaire et, pour le maintenir, n’ont d’autres réponses que des solutions racistes.
Une logique dont fait les frais aussi l’accès aux soins. L’aide médicale d’État (AME) est remplacé par une aide médicale d’urgence (AMU) qui ne permettrait plus les remboursements des prestations médicales et donc serait un obstacle à l’accès aux soins.
Pour défendre les profits (une fois de plus records en 2023), il s’agit d’entretenir la suspicion envers les travailleurEs étrangerEs, de saper la solidarité entre les travailleurEs en s’attaquant aux plus fragiles.
Le 14 janvier à l’appel des organisations de sans-papiers et le 21 janvier à l’appel des organisations syndicales et de personnalités, il nous faudra être très nombreuxEs dans la rue pour que cette loi raciste ne soit pas appliquée et pour empêcher les idées fascistes d’avancer. Et nous réclamerons l’ouverture des frontières et la liberté de circulation.