La Coupe du monde de football aura été l’occasion pour la droite et l’extrême droite de laisser libre-cours à leur haine raciste. Ainsi le Front national nous a donné un aperçu des mesures discriminatoires qu’il entendait adopter si – par malheur – il devait accéder un jour au pouvoir...
L’accession de l’équipe d’Algérie, pour la première fois de son histoire, à un niveau élevé de la compétition (les huitièmes de finale) a fort légitimement suscité un enthousiasme particulier dans la jeunesse issue de l’immigration, notamment algérienne. Français ou pas, ou encore possédant la double nationalité, les exploits des Fennecs ne pouvaient qu’enflammer toute une jeunesse le plus souvent issue des quartiers populaires, habituée aux discriminations racistes et à la répression policière.
L’expression publique de cette « fierté collective » – qui n’a rien avoir avec un quelconque soutien politique au régime algérien – a été le déclencheur d’une campagne de haine parfaitement préparée et mise en scène sur les réseaux sociaux d’extrême droite, accompagnée notamment par des déclarations sulfureuses du député maire de Nice, l’UMP Christian Estrosi (depuis longtemps facho compatible) et de la présidente du F Haine.
C’est dans ce contexte nauséabond qu’au soir de l’élimination de l’Algérie, quelques dizaines de paras du 3e régiment d’infanterie ont manifesté, drapeau allemand en tête (sic) dans les rues de Carcassonne pour fêter la défaite et provoquer les supporters des Fennecs ! Un acte isolé qui en dit long sur l’état d’esprit qui règne dans certaines casernes...
Déjà célèbre pour ses arrêtés anti-mendicité et sa phobie anti-Rom, Christian Estrosi n’a pas hésité à prononcer un arrêté municipal parfaitement illégal, prétendant vouloir « interdire l’utilisation ostentatoire de drapeaux étrangers pendant la Coupe du monde »... Retoqué par le tribunal administratif, il persiste et entend proposer au Parlement un « projet de loi instaurant pour le maire la faculté de prendre toute mesure préventive dans le but de prévenir toute atteinte à l’ordre public, eu égard aux circonstances locales ».
La politique du bouc émissaire
Soumis à forte concurrence, le Front national ne pouvait évidemment pas louper une si belle occasion pour réaffirmer sa haine raciste et xénophobe, notamment envers les jeunes arabes. Invitée sur Europe 1, Marine Le Pen en a appelé à « mettre fin à la double nationalité ». Cette mesure qu’entendrait prendre le FN s’il était au pouvoir n’est certes pas une nouveauté, et figurait déjà dans le programme de Jean-Marie Le Pen lors de la campagne présidentielle de 2007. Prenant prétexte des manifestations de joie, émaillées de quelques rares incidents consécutifs à la qualification de l’Algérie, elle en voit « la démonstration de l’échec total de la politique de l’immigration et le refus exprimé par un certain nombre de binationaux de l’assimilation ».
Bien entendu, cette interdiction de la double nationalité ne s’appliquerait pas aux « Européens » ni aux « Américains », avait-elle déclaré il y a quelques mois lors d’un débat télévisé... Nous n’en doutions pas ! Cette propagande raciste n’a pour but que de désigner un ennemi intérieur, responsable du chômage et de l’insécurité : les immigréEs, et plus particulièrement celles et ceux venus de l’Afrique subsaharienne et du Maghreb.
La montée du racisme, de l’intolérance, et la politique du bouc émissaire, sont aujourd’hui favorisés par les reculades idéologiques de la gauche de gouvernement qui font le lit du Front national. Les anticapitalistes doivent mettre tous leurs efforts à relancer des campagnes de mobilisations autour du soutien aux sans-papiers, aux Roms, pour l’égalité des droits, contre l’extrême droite.
Alain Pojolat