Publié le Vendredi 5 octobre 2012 à 12h31.

Roms : à Marseille, les sinistres émules de Valls

À l’ancienne concession Skoda, dans le 15e arrondissement de Marseille, tout le monde s’active pour nettoyer le terrain que la LDH et le collectif Solidarité Roms viennent de « réquisitionner ». Côte à côte, ces derniers ainsi que des militants du RESF, du NPA, de Rencontres Tziganes et, bien sûr, les familles concernées, s’arment de sacs poubelle et de balais pour libérer de l’espace et pouvoir réfugier la cinquantaine de Roms pour la nuit. Tout le monde a bien évidemment en tête la soirée de jeudi, où des habitants de la cité des Créneaux sont venus faire police eux-mêmes et chasser ces familles avant de brûler les tentes qui restaient. On pense bien sûr aux pogroms, aux milices fascistes. Quelque chose a changé : après la droite décomplexée, menant la politique dont le FN rêvait, c’est la gauche sécuritaire et raciste de Valls qui s’active, justifiant l’action des riverains. La maire de secteur, PS, S. Ghali, qui demandait l’intervention de l’armée dans les quartiers populaires, dit « comprendre » l’action des riverains. Elle organisait il y a peu des manifestations pour demander à ce qu’on chasse les Roms ! Ces habitants n’ont donc fait que reproduire, avec l’appui des éluEs locaux, la politique de l’État, devant les yeux de la police qui n’a « relevé aucune infraction ». Autour du nouveau terrain occupé, les habitantEs débattent : certainEs craignent pour leur quartier mais sont prêts à cohabiter sans problème, d’autres menacent de venir le lendemain armés de Kalachnikovs et reprennent inconsciemment les discours de Sarko, Guéant et Le Pen. Certains d’entre eux sont eux-mêmes musulmans et/ou issus de l’immigration… Pourtant, comme le disait le communiqué de « la Voix des Roms », l’incendiaire se trouve place Beauvau. Des solutions politiques existent bel et bien. Que dire des bâtiments en voie de démolition de cette cité des Créneaux où a eu lieu un incendie et qui pourraient être réhabilités et utilisés pour des solutions pérennes de relogement à moindre coût plutôt que démolis ? Que dire de ces terrains ainsi vidés au profit du projet Euromed, le nouveau centre financier et urbain qui se construit comme un relais de la politique impérialiste de la France et comme une opération d’épuration anti-pauvres et immigrés. Cette ville de Marseille, populaire et construite d’immigrations, est devenue un enjeu national depuis quelques semaines. Sous couvert de lutte contre la délinquance, ce sont les pauvres, les Roms, les immigrés, les musulmans, que l’on chasse. Mairie UMP et mairies de secteur socialistes veulent faire « ville propre », jouant à débattre autour de quelques nuances. Tous les habitants ne sont pas tombés dans le panneau des politiques racistes, bien au contraire, et des habitants solidaires se mobilisent pour faire face à l’urgence. Au-delà, il sera question surtout d’imposer à la préfecture l’organisation d’une solution de relogement, d’attribution d’un terrain provisoire, promesses jamais mises en œuvre. Les entraves légales à la circulation et au travail des Roms, pourtant citoyens européens, doivent immédiatement être levées. Un plan d’urgence face au chômage, aux discriminations à l’embauche, au mal-logement doit être lancé afin que l’ensemble des quartiers Nords de Marseille, Roms compris, trouve une solution commune à cette crise qui attise les haines et aggrave la misère de toutes et tous.Kevin VACHER