Comme le dit l’article 15 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». Le principe est excellent, mais on peut se demander pourquoi son application a été confiée à un organisme hérité de la monarchie...
Pendant longtemps, la Cour des comptes a été une assemblée de hauts fonctionnaires peu actifs et bien payés. En 1989, un dénommé François Hollande n’hésitait pas à déclarer dans une émission de télévision qu’il y avait été bien traité : on n’était pas vraiment obligé de travailler malgré le montant du salaire... Depuis, la Cour des comptes, toujours considérée comme une des aristocraties de la fonction publique, s’est mise à travailler un peu plus. Elle est actuellement présidée par un « socialiste » nommé par Nicolas Sarkozy. Et « Demander compte » s’est largement transformé en gardiennage de l’austérité et des politiques néolibérales.
Le rapport annuel publié il y a quelques jours martèle ainsi qu’il va falloir réduire les déficits conformément aux engagements pris devant la Commission de Bruxelles, et que pour cela, la seule voie est de réduire les dépenses dans un effort d’une ampleur bien supérieure à celui des années passées. Qu’importe si les hôpitaux sont au bord de l’asphyxie et que de nombreux habitantEs sont écartés de certains soins. Qu’importe si l’école, notamment dans les quartiers populaires, ne peut assurer sa mission au point que les inégalités scolaires s’accroissent. Qu’importe si de nombreuses familles sont obligées de faire face à des dépenses importantes pour la maison de retraite d’un parent. Qu’importe si la diminution des transferts aux communes et départements les amènent à serrer la vis sur les services publics et les aides sociales…
Il n’est pas question d’augmenter l’impôt sur la fortune ou les tranches supérieures de l’impôt sur le revenu, ni de mettre fin aux privilèges fiscaux des grandes entreprises. Ce sont les dépenses qu’il faut réduire, et naturellement pas les 20 milliards annuels du CICE qui n’ont pratiquement pas créé d’emplois, ni les dépenses des interventions militaires extérieures. La Cour trace ainsi la feuille de route du prochain président de la République. Une feuille de route que seul un troisième tour social pourra mettre en échec !
Henri Wilno