« Je souhaite que l’on puisse revisiter cette belle invention gaulliste de l’intéressement et de la participation ». Dans son interview télévisée du dimanche 15 octobre, Emmanuel Macron a glissé quelques mots sur ces éléments de rémunération qui, pour une partie des salariéEs, s’ajoutent au salaire proprement dit. Les salariéEs, a déclaré Macron, doivent « quand ça va mieux, avoir leur part de réussite ». Un débat sera (peut-être) lancé en 2018 sur le sujet.
Cette vieille lune gaulliste du partage des profits revient de temps à autre chez les politiques quand ils doivent donner de la poésie à une réalité difficile à vendre. En 2009, Sarkozy avait fait plus fort : en pleine crise financière et après les manifestations massives du 29 janvier 2009, il avait proposé un partage des profits selon « la règle des trois tiers » : un tiers pour les actionnaires, un tiers pour les salariéEs, un tiers pour l’investissement. Pour la mettre en place il avait commandé un rapport. Puis ce fut l’enterrement. Sans fleurs ni couronnes.
Rappelons que l’intéressement et la participation ne bénéficient qu’à une partie des salariéEs du privé, surtout celles et ceux des grandes entreprises. Et que, si un peu plus de pouvoir d’achat peut toujours sembler bon à prendre, les sommes concernées ne sont pas soumises à cotisations sociales et il n’y a aucune garantie à ce qu’elles soient reconduites d’une année sur l’autre. Mais surtout, la plupart des dispositifs intègrent des critères introduisant une concurrence entre services, des pressions sur la productivité et même sur la déclaration des accidents de travail.
De plus, le montant distribué dépend aussi de la façon dont les comptes de l’entreprise sont présentés : pour réduire la base sur laquelle sont calculés intéressement et participation, les patrons savent organiser des circuits qui font « fuiter » les profits. Ainsi, la quasi-totalité des bénéfices de Lapeyre (contrôlé par le groupe Saint-Gobain) a échappé pendant des années à la participation des 1 700 salariéEs car ils étaient transférés vers deux sociétés holding sans salariéEs et ensuite reversés à Saint-Gobain. Les salariéEs, soutenus par la CGT et FO, avaient porté l’affaire en justice : le 26 septembre dernier, le tribunal de grande instance de Nanterre a tranché en faveur de Lapeyre !