Alors que la barre des 100 000 morts du Covid va être franchie, que les hôpitaux sont saturés et que la campagne vaccinale est loin d’être à la hauteur de l’épidémie, la Macronie dévoile peu à peu ses nouveaux projets antisociaux. La crise sociale est profonde, les mécanismes de solidarité sont très largement insuffisants, mais le pouvoir nous promet toujours plus d’austérité.
Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire est formel : la dette publique, qui s’est considérablement accrue avec les « plans de soutien » du gouvernement, ne sera « certainement pas » remboursée par l’impôt. Au programme : compression des dépenses publiques et « réformes structurelles », avec notamment le retour programmé du plan de destruction du système de retraites, mais aussi la volonté maintenue de faire passer en force la contre-réforme de l’assurance chômage.
Destruction sociale programmée
Le calendrier est particulièrement éclairant quant à la nature de classe de ce gouvernement. Ainsi, alors que les destructions d’emplois se comptent en centaines de milliers et que le nombre de chômeurEs est reparti durablement à la hausse, le pouvoir entend imposer une réforme de l’assurance chômage qui va avoir pour conséquence une baisse des allocations et une réduction du nombre de leurs bénéficiaires. Selon la dernière étude d’impact de l’Unédic, ce sont ainsi, dès la première année, 1,15 million de personnes qui verraient leurs allocations réduites en raison du nouveau mode de calcul du SJR (salaire journalier de référence), avec une baisse moyenne de 17 % mais pouvant aller jusqu’à 40 % dans certains cas. Et ce sont celles et ceux que l’on surnomme « intermittentEs de l’emploi », alternant activité réduite et périodes chômées, qui paieront le prix le plus élevé.
Les personnels de la culture, mobilisés depuis plus d’un mois, ne s’y sont pas trompés, en faisant du retrait de la contre-réforme de l’assurance chômage leur principale revendication. Face aux critiques, le pouvoir essaie de jouer la montre et de faire diversion, en tentant de discréditer l’Unédic ou en promettant de « lutter contre la précarité organisée » au moyen d’un bonus-malus sur les contrats courts, qui entrerait en vigueur à… l’automne 2022. Un rideau de fumée qui dissimule mal le désastre social que représente cette réforme, qui va fragiliser encore un peu plus les plus fragiles, accroître les inégalités et décourager les personnes cherchant un emploi, le tout au nom du crédo néolibéral selon lequel les chômeurEs seraient responsables de leur situation et qu’il faudrait les « inciter » par tous les moyens à accepter n’importe quel emploi sous-payé.
Face à l’hyper-austérité, retrouver le chemin des mobilisations
Le 9 avril, le quotidien économique les Échos révélait le contenu du « programme de stabilité » élaboré par le ministère de l’Économie, quelques jours avant qu’il soit envoyé à la Commission européenne. Un « programme » qui confirme que la volonté de maintenir la réforme de l’assurance chômage n’est pas un accident de parcours, mais s’inscrit pleinement dans les projets du gouvernement pour un hypothétique deuxième mandat d’Emmanuel Macron. Ainsi, alors que le déficit budgétaire s’est élevé à 9,2 % du PIB en 2020 et devrait être du même ordre en 2021, le gouvernement prévoit un retour aux 3 % en 2027. Un « tour de vis » majeur, qui va impliquer une hyper-austérité dans la mesure où le gouvernement refuse d’envisager toute augmentation des recettes – et donc des impôts – alors que l’argent existe pourtant, comme le montre l’augmentation du nombre de milliardaires en France (de 39 à 42 entre 2020 et 2021) et les bénéfices du CAC 40 (36 milliards d’euros en 2020 malgré la crise).
Comme le résume Romaric Godin de Mediapart : « Dans ce contexte, une réforme des retraites visant à réduire rapidement les dépenses semble inévitable, ainsi que la poursuite de l’austérité salariale pour les fonctionnaires, la réduction du nombre des agents et les économies dans le système de santé. »1 En d’autres termes, la poursuite et l’amplification de la guerre sociale, menée par un gouvernement dont la catastrophique gestion de la crise sanitaire donne une idée du peu d’importance qu’il accorde à nos vies lorsqu’il s’agit de faire tourner la machine capitaliste. Face à un tel projet, nous n’avons pas d’autre solution que de reprendre le chemin des mobilisations, dans un contexte sanitaire certes pesant mais qui ne saurait être un obstacle insurmontable à la construction d’une opposition de rue au gouvernement et à ses plans. Les personnels de la culture, les salariéEs de l’Éducation nationale, les boîtes en lutte contre les licenciements, nous montrent qu’il est possible de dépasser la résignation et de porter le fer contre le pouvoir et le patronat. Et ce n’est pas parce que certains se lancent déjà dans la compétition présidentielle que nous attendrons 2022 pour nous faire entendre et construire le touTEs ensemble nécessaire pour stopper Macron.
- 1. Romaric Godin, « Pour son second mandat, Macron promet l’austérité », Mediapart, 9 avril 2021.