À la fin du mois de février, la direction de Ford annonçait qu’elle n’investirait plus dans son site de production de boîtes de vitesse de Blanquefort (33). Ce sont plus de 900 emplois directs qui sont menacés, plusieurs milliers si l’on compte les emplois induits. Depuis lors, les salariéEs se mobilisent.
Cela va faire un mois, depuis l’annonce du désengagement de Ford, que les productions sont au plus bas. C’est la première forme d’écœurement et de protestation des salariéEs. Quoi de plus légitime de ne plus travailler quand les dirigeants nous disent qu’ils n’ont plus besoin de nous d’ici un an ? D’ailleurs ils ne savent pas trop comment gérer cette situation. On a bien eu droit à des réunions pour expliquer que Ford ne nous abandonnera pas comme ça, qu’une solution de repreneur est recherchée et qu’il faut, pour cela, se remettre au travail, pour être bien vus ! Mais cela ne convainc pas du tout…
D’abord parce qu’un repreneur on n’y croit pas, on nous a déjà fait le coup en 2009, c’est forcément bidon car c’est la manière classique de sous-traiter une fermeture. Ce discours qui vise à toujours culpabiliser les salariéEs ne fonctionne pas pour l’instant car c’est le sentiment d’être méprisés qui l’emporte largement. Ford se moque du monde, il n’y a aucun argument pour justifier son départ. Même les pouvoirs publics, même le gouvernement se disent surpris de l’attitude d’une multinationale qui ne s’embarrasse d’aucune justification après avoir encaissé des dizaines de millions d’euros de financements publics.
Dépasser la résignation et le fatalisme
Toutes les conditions devraient être réunies pour se mettre à mener une bataille pour défendre mordicus nos emplois. Mais ce n’est pas vraiment l’ambiance dans l’usine. Certes, ça ne travaille pas, ça discute beaucoup dans les secteurs. Certes, il y a des actions mais pas si importantes que cela. La colère est là, mais mêlée de résignation, de fatalisme, un climat entretenu par les syndicats à part l’équipe CGT qui essaie de mobiliser, notamment en lien avec les luttes extérieures comme celles des postierEs, des cheminotEs et des étudiantEs.
À l’initiative de la CGT Ford, une réunion de « convergence » a été organisée le 13 mars, qui a débouché sur une manifestation le 24 mars pour la défense des emplois de touTEs, dans le public et dans le privé. Nous étions 500 personnes, et c’est bien. Une autre réunion est proposée au CE de l’usine, le 29 mars, pour donner suite aux 22 et 24 mars dans le but de déboucher sur une autre initiative unitaire.
La force de notre lutte chez Ford dépend des mobilisations autour, du climat social ambiant. On ne peut pas gagner seuls. C’est aussi pour cela que nous organisons une journée débat concert de soutien le samedi 21 avril, avec des sociologues, journalistes, des chanteurEs, humoristes, dessinateurEs, photographes, avec les milieux militants pour populariser, élargir la bataille pour les emplois, contre les reculs sociaux.
Autant de rendez-vous qui nous donnent du travail (du bon) et du courage.
Philippe Poutou