Le 4 juillet, les salariéEs de Fralib fêtaient avec 800 personnes leur victoire dans leur usine de Gémenos (13), après 1 336 jours de lutte. Près de 4 années.
En septembre 2009, la multinationale Unilever annonçait la fermeture de cette usine de 180 salariéEs, pour fabriquer le même thé en Pologne. La lutte commence pour que cette usine continue à vivre, pour préserver les emplois directs et indirects. Là commence une bataille, que beaucoup considéraient comme perdue d’avance, contre la fermeture puis pour la reprise sous forme d’une Scop. Les salariéEs, entraînés par une équipe militante déterminée et boulimique d’initiatives de lutte, vont résister. Occupations d’usine, manifestations à Marseille, appel au boycott de la marque, déplacements de délégation dans d’autres lieux de luttes… les « fralibiens » sont partout ou quasiment. La bataille est aussi menée juridiquement, les plans de licenciements sont dénoncés et annulés. Les pouvoirs publics, les élus sont amenés à prendre position, à se solidariser des salariéEs. La perspective d’une reprise de l’usine par ces derniers est popularisée au travers des nombreuses initiatives.Le bras de fer va durer plusieurs années. Certains n’y croyant pas ou plus accepteront d’être licenciés. 70 salariéEs tiendront, soutenus par les réseaux syndicalistes (notamment la CGT), associatifs ou politiques. Les « fralibiens » ne se contentent pas d’être soutenus, ils soutiennent aussi et participent aux actions d’Arcelor, Goodyear, PSA et Ford.
Une nouvelle batailleIls tiennent si bien qu’ils finissent par gagner. Unilever lâche prise : la Scop est créée, les machines sont données, les 14 élus CE seront payés par Unilever jusqu’à fin 2014 pour assurer la transition, des millions d’euros seront mis à disposition pour relancer la production et assurer les modernisations nécessaires. Il s’agit donc d’une nouvelle bataille. Mettre en place une Scop véritablement militante. Ils ont tout à faire, tout à discuter : quoi et comment produire. Ils veulent une production à l’ancienne, de qualité, naturelle, avec des produits de proximité, issu de l’agriculture écologique. Et puis il y a tout le reste : la mise en place collective de l’organisation du travail, qui fait quoi, comment ? Un principe déjà acquis : pas de sous-traitance, tous les salariéEs seront sous le même statut de la Scop. Un boulot énorme mais enthousiasmant. Certes, le capitalisme n’est pas tombé, la Scop restera dans un milieu économique hostile et l’avenir sera certainement compliqué. Mais c’est l’aboutissement d’une longue bataille. Une victoire qui fait du bien car la lutte paye. Maintenant il faut que cette expérience profite à tous, qu’elle soit partagée, racontée, transmise. À suivre de près.
Philippe Poutou