Publié le Lundi 7 août 2017 à 12h21.

Nissan-Renault leader de l’anti-syndicalisme

Dans l'usine Nissan de Canton, située dans l'État du Mississippi dans le Sud des États-Unis, les syndicats y sont interdits depuis la création de l'usine, y compris l’UAW, le syndicat historique des ouvriers de l'automobile pourtant habitué à signer des accords peu glorieux avec les « géants » de Detroit, Ford et General Motors. Mais Nissan, comme les autres firmes automobiles, implante ses nouvelles usines dans le Sud là ou les conventions collectives de Detroit ne s'appliquent pas, où les salaires sont plus bas et où les entreprises s'appuient sur les vieilles traditions de discrimination raciale pour mieux diviser les travailleurs. Dans l'usine Nissan de Canton, 80 % des ouvriers sont noirs. Un référendum truquéDepuis des années, des ouvriers de cette usine mènent une campagne internationale pour leur droit à se syndiquer et contre la répression que Nissan organise dans l'usine contre toute forme de résistance collective ou individuelle. Cette campagne a reçu le soutien de mouvements nord-américains contre les discriminations raciales et pour les droits des noirs. Une délégation s'était rendue il y a quelques mois au siège de Renault pour dénoncer la responsabilité de Carlos Ghosn, le PDG multicartes de Renault et Nissan.Les particularités du droit états-unien sont telles qu'un référendum peut être nécessaire, à l'intérieur d'une entreprise, pour la création d'un syndicat. Il a eu lieu le jeudi 3 août à Canton. Selon les résultats diffusés par le National Labor Relations Board (NLRB), l'autorité fédérale en charge des relations sociales qui a supervisé le référendum tenu le jeudi 3 août, 2 244 ouvriers (contre 1307) ont rejeté l'ouverture d'une section syndicale sur le site. En fait il y a eu seulement 3 500 ouvriers autorisés à participer au vote alors que près de 3 000 – les intérimaires et les travailleurs à temps partiel – en ont été exclus. Contrairement aux cris de victoire patronale relayés partout dans le monde, il n'y a pas eu de majorité parmi la totalité des travailleurs en place dans l'usine pour refuser la création d'un syndicat. Une campagne d’intimidationDans les semaines qui ont précédé le vote, la direction de l'usine Nissan a poursuivi sa politique d'intimidation. L'autorité fédérale elle-même a constaté que Nissan avait menacé les travailleurs de perte de salaires et d'une possible fermeture de l'usine si les salariés approuvaient la création d'un syndicat, et cela à coups d'interventions de la maîtrise et projections de vidéos dans les ateliers. L'UAW dénonce : « Nissan et ses alliés anti-travailleurs ont mené une campagne malhonnête fondée sur la peur, la désinformation et l'intimidation ».La direction de l'usine Canton de Nissan se félicite, arguant du fait que ce vote – truqué selon les standards habituels des droits démocratiques – va « renforcer la compétitivité de l'usine », bref les profits de Nissan dont le dirigeant et bénéficiaire est Carlos Ghosn. La campagne contre la répression et pour les droits à s'organiser dans l'usine Nissan de Canton va continuer et exiger un soutien actif en particulier en France là où l'État actionnaire de Renault est donc un soutien du PDG de Nissan, champion de la répression antisyndicale.Quelle démocratie dans les entreprises ?Le recours au référendum pour s'en prendre aux syndicats et réprimer les résistances à l'usine ou dans les services est un vieux classique de la tactique patronale anti-ouvrière. Elle n'est pas seulement remise au goût du jour aux États-Unis. On en avait déjà vu une application dans l'usine Smart en France où la direction y a eu recours pour faire passer ses 39 heures de travail payées 37. Les ordonnances Macron veulent favoriser encore plus cette pratique, n'inventant rien de nouveau mais s'inspirant des pires méthodes réactionnaires. La preuve par l'usine Canton de Nissan : il n'y a pas de démocratie possible lorsque les collèges électoraux sont charcutés de manière arbitraire, lorsque les votes sont obtenus à coups de chantage patronal, et lorsque pèse la relation de subordination qui assujettit le salarié au patron qui l’emploie.

Jean-Claude VessilierVoir aussi :Un article de La TribuneLa déclaration de l’UAW