Ça se passe comme ça chez McDonald’s…
Le 16 octobre dernier, une délégation de salariéEs de McDonald’s, accompagnée de soutiens du mouvement féministe et antiraciste, s’est rendue au siège de l’entreprise à Guyancourt pour remettre 114 témoignages de salariéEs victimes de harcèlement et de discriminations sexistes, racistes et LGBTIphobes1.
« McDo : Macho ! »
Les salariéEs, représentés par des membres du Collectif McDroits, ont, de plus, déposé une liste de revendications relatives à ce qu’ils et elles estiment être des « problèmes systémiques » dans l’entreprise. Ils et elles exigent entre autres des formations du personnel encadrant, « un système d’évolution calqué sur l’ancienneté et non l’apparence physique », la fin de la discrimination à l’embauche des femmes voilées, le droit pour les personnes trans d’utiliser leur prénom d’usage et l’arrêt de l’obligation du port de la jupe pour les hôtesses d’accueil2.
Un mois plus tard, une journée de grève a eu lieu dans un McDonald’s du Havre suite au harcèlement sexiste et sexuel que plusieurs salariées subissaient sur leur lieu de travail de la part d’un délégué du personnel. À l’issue de cette journée, les grévistes (qui ont en moyenne 20 ans), ont négocié avec la direction : elles ont obtenu le paiement de la journée de grève, la démission des fonctions de délégué du personnel et un engagement de la part de la direction à mener une enquête sur les violences sexistes et sexuelles dans le restaurant3.
McDonald’s promet des avancées… mais dans les faits réprime !
Début décembre 2020, le Collectif McDroits a reçu une réponse du siège de McDo : l’entreprise promet la création d’un numéro vert pour les victimes de violences au travail, la mise en place d’une charte d’engagement contre les discriminations et le harcèlement au travail et une note envoyée aux restaurants pour rappeler l’interdiction d’imposer aux salariées le port de la jupe.
Mais quelques jours après la mobilisation au Havre, Mathilde, qui faisait partie des salariées harcelées, a été licenciée par le restaurant pour « faute grave ». On lui reproche des messages envoyés à propos du harcèlement à McDonald’s sur une conversation Messenger privée et le like d’une publication Facebook… Mathilde, soutenue par la CGT locale, conteste son licenciement et s’est donc engagée dans une bataille pour faire valoir ses droits aux Prud’hommes.
Et depuis…. silence radio de la direction de McDonald’s. Finalement, aucun des engagements pris par la direction début décembre n’a été tenu. Le Collectif McDroits exige toujours, face à l’inaction de la direction, un nouveau rendez-vous. Dans le même temps, il prépare le lancement d’une nouvelle enquête en interne sur le racisme et l’islamophobie et poursuit son travail autour des revendications féministes et LGBTI.
L’avenir des luttes au travail : l’articulation des oppressions et de l’exploitation
Le collectif McDroits a fait sa première apparition publique le 8 mars 2020, en organisant un collage devant les McDonald’s de Paris pour dénoncer le sexisme au travail. Cette année, ils et elles organisent le 8 mars au matin une conférence de presse interprofessionnelle pour dénoncer le sexisme au travail et l’attitude de McDonalds, avant de partir en cortège à la manifestation.
Le collectif, composé essentiellement de très jeunes salariéEs et ex-salariéEs du groupe, marque l’entrée d’une nouvelle génération militante sur les lieux de travail. Une génération entrée en politique sur les questions d’oppressions spécifiques : sexisme, racisme, LGBTIphobie, validisme, grossophobie. Une génération qui ne retrouve pas forcément ces préoccupations dans les syndicats et cherche des moyens de les porter collectivement.
En tant que militantEs féministes révolutionnaires, un de nos rôles fondamentaux est de retisser les liens brisés entre luttes contre les oppressions et luttes contre l’exploitation en montrant comment elles s’articulent et participent d’une même logique. Cela passe par le soutien à ces luttes, la bataille dans nos organisations politiques et syndicales et la reconstruction d’un mouvement féministe de masse qui s’ancre profondément dans l’antiracisme, la lutte contre les LGBTIphobies et la lutte des classes.
- 1. Lire Khedidja Zerouali, « Violences sexuelles : plongée dans l’enfer de salariées de McDo », Mediapart, 12 octobre 2020, et Quentin Muller et Yann Castanier, « Sexisme, grossophobie et harcèlement, 78 employés de McDonald’s brisent l’omerta », Streetpress, 12 octobre 2020.
- 2. Collectif McDroits, « Harcèlement sexuel à McDonald’s : le collectif McDroits demande la fin de l’impunité », blog Mediapart, 12 octobre 2020.
- 3. Khedidja Zerouali, « Au Havre, McDo licencie une de ses lanceuses d’alerte », Mediapart, 8 janvier 2021.