Deux mois après les élections législatives, le nouveau gouvernement autrichien vient d’être constitué. L’extrême droite y est en position de force, avec entre autres les ministères de la Défense, de l’Intérieur et des Affaires étrangères.
Il n’y a finalement pas eu de surprise. L’annonce d’un gouvernement composé de la droite chrétienne-démocrate (« Parti du peuple d’Autriche », ÖVP) et de l’extrême droite (« Parti de la liberté d’Autriche », FPÖ) était (malheureusement) attendue. L’ÖVP et le FPÖ étaient arrivés respectivement premier (avec 31,5 % des voix) et troisième (26 %) lors des élections législatives du 15 octobre 2017. Il était entendu que la social--démocratie, deuxième force politique avec 26,9 %, allait passer à l’opposition après avoir gouverné le pays dans le cadre d’une « Grande coalition » avec la droite depuis 2006.
Deux partis, un même camp
Les antifascistes du pays disaient depuis plusieurs semaines s’attendre à la mise en place effective du gouvernement après le 10 décembre, puisqu’une annonce à la mi-décembre allait faire tomber les premières protestations en période de Noël… La mobilisation serait donc, de fait, reportée de plusieurs semaines, après la « trêve des fêtes ». L’accord de gouvernement entre les partis ÖVP et FPÖ a ainsi été rendu public le vendredi 15 décembre au soir, le gouvernement prêtant serment le lundi suivant. Malgré tout, plusieurs milliers de personnes ont manifesté à Vienne dès le lundi 18 décembre.
Sans ce calcul, l’installation du gouvernement aurait pu intervenir plus tôt : les deux partis étaient largement d’accord entre eux avant les élections, et les sondages montrent que leurs électorats respectifs se considèrent désormais massivement comme appartenant au même camp. L’ÖVP, un parti anciennement à dominante paysanne, modéré et pas très nationaliste (plutôt attaché aux « identités régionales », au catholicisme, à « l’Europe »), mais à direction néolibérale, a connu une impressionnante mue. Son appareil a été repris en main depuis mai 2017 par son nouveau président, le ministre des Affaires étrangères du gouvernement sortant et désormais chancelier : Sebastian Kurz. Un personnage dont les dents rayent le parquet, qui ressemble à un mélange entre un Macron très à droite (de manière affichée) et un Berlusconi très jeune (moins, pour l’instant, les « affaires »), puisqu’il n’a que 31 ans.
Soutenir les antifascistes en Autriche
Dès le début, Kurz avait laissé transparaître qu’il allait faire campagne sur la limitation de l’immigration, et qu’il serait prêt à quasiment toutes les concessions à l’extrême droite sur ce plan. Cependant, à ses futurs alliés d’extrême droite, il a fixé deux limites : il ne sera pas question de remettre en cause l’appartenance à l’Union européenne, ni d’afficher ouvertement de l’anti-sémitisme. Voilà qui laisse de confortables marges de manœuvre au FPÖ…
Les migrantEs seront les premières cibles du nouveau gouvernement, et les salariéEs en général seront l’objet de violentes attaques, puisque le gouvernement a prévu d’autoriser les employeurs et les salariéEs à « se mettre d’accord » sur l’allongement du temps de travail jusqu’à 12 heures par jour et soixante heures par semaine.
Autant dire que les mouvements sociaux en France et les forces antifascistes doivent suivre et activement soutenir toutes les résistances qui verront le jour en Autriche.
Bertold du Ryon