La dictature pétrolière au Congo-Brazzaville, l’un des piliers du système néocolonial de la « Françafrique », a de beaux jours devant elle. Ce qui signifie des jours laids pour son peuple, qui est majoritairement très loin de bénéficier de la richesse pétrolière.
L’Union africaine avait choisi le Congo-Brazzaville (officiellement « République du Congo », à ne pas confondre avec la RDC voisine) comme pays médiateur dans le conflit – proche d’une guerre civile – qui déchire la Libye. Samedi 16 septembre, le « maréchal » Khalifa Haftar, l’un des acteurs clés de ce conflit, a ainsi été reçu par le président du Congo-Brazzaville, Denis Sassou-Nguesso, dont le pays est également membre du « Comité de haut niveau » de l’Union africaine.
Cette valorisation du rôle politique de la dictature de Sassou-Nguesso est un marqueur du succès du régime, qui a réussi à se stabiliser malgré un mouvement de masse qui s’était dressé contre lui à l’automne 2015 et début 2016 pour s’opposer à la « réélection » de Sassou-Nguesso, après plus de trois décennies passées au pouvoir. Malgré tout, Sassou-Nguesso a réussi à se faire « réélire » (selon les chiffres officiels) au mois de mars 2016, après une intense répression et après avoir fait bloquer internet sur la totalité du pays. Pire, les 16 et 30 juillet 2017, son parti – le « Parti congolais du travail » (PCT) qui a conservé son ancien nom datant de la période pro-soviétique du pouvoir, dans les années 1970 – a réussi à rafler une majorité lors des élections législatives et locales. Là aussi malgré des résistances réelles : dans un quartier de la capitale Brazzaville, Poto-Poto, des pierres ont ainsi été jetées sur des militaires qui venaient voter de façon visiblement irrégulière, pour gonfler les urnes au profit du pouvoir.
La Françafrique et les amis de Poutine
Certes, les finances de l’État sont profondément en crise, mais cela ne dérange pour le moment pas trop la clique de milliardaires –- -issus du clan Sassou-Nguesso – qui gère le pays, dans la mesure où c’est le peuple qui paye la facture.
Un rapport rendu public le mardi 12 septembre par l’ONG « Public Eye » en Suisse lève un peu plus le voile sur les pratiques de corruption à grande échelle en vigueur au Congo-Brazzaville. La veille, la justice helvétique avait décidé de lancer une enquête contre la société Gunvor, quatrième plus grande société mondiale de négoce de matières premières. Celle-ci est accusée, entre autres, d’avoir versé environ 30 millions de dollars de commissions – d’argent de la corruption – aux décideurs, dont Denis Christel Sassou-Nguesso, qui n’est autre que le fils du dictateur et le chef de la « Société nationale du pétrole » du Congo (SNPC). Entre 2010 et 2012, Gunvor a décroché au Congo-Brazzaville un contrat pétrolier d’une valeur de 2,2 -milliards de dollars…
Chose remarquable : le fondateur de Gunvor, Guennadi Timtchenko, est un oligarque russe réputé être très proche de Vladimir Poutine. Mais on retrouve des Français à quasiment tous les étages de la société Gunvor, que ce soit en tant que directeur financier (« Bertrand G. ») ou en tant qu’intermédiaires (Olivier Bazin, David Benouaiche ou encore le Franco-Israélien Eliyahu Elbaz).
Ainsi, même lorsque ce n’est pas Total qui exploite les richesses du sous-sol congolais, des acteurs français sont étroitement impliqués dans le « partage du gâteau » et dans le soutien aux dictatures, avec une tendance à la « diversification » de la mafia françafricaine qui travaille de plus en plus avec des membres et des proches du pouvoir russe.
Bertold du Ryon