Depuis le 15 novembre, la Guadeloupe est en grève générale, avec en pointe les personnels de l’hôpital de Pointe-à-Pitre et les pompiers. Et lundi 22 novembre, la grève générale s’est aussi étendue à la Martinique, avec aussi des blocages et des manifestations.
Les raisons de la colère sont centrées depuis l’été sur la question de l’obligation vaccinale pour les agentEs hospitaliers et les pompiers, mais la mobilisation a des racines sociales profondes.
Oui à la protection, non à la répression
Les décisions prises en métropole ont été plaquées sur la Guadeloupe alors que le taux de vaccinéEs de plus de 18 ans (au moins une dose) y est de 46,43 % contre 91 % en France (chiffres ARS).
Les syndicats avaient commencé à négocier un protocole adapté cet été mais, fin septembre, Paris a imposé la rupture de toute négociation et l’application à la Guadeloupe des mesures prises en France. Depuis, se sont multipliées les arrestations, les violences policières, et déjà plus de 500 agentEs hospitaliers ont été suspendus.
Le mécontentement parti de la méfiance envers l’État et la vaccination trouve sa source dans les profondes inégalités que vit la population antillaise, et la colère créée depuis 50 ans par le scandale du chlordécone, produit de traitement des bananeraies, insecticide toxique et cancérogène utilisé par les grands producteurs bananiers avec l’aval des différents pouvoirs de l’époque, provoquant une pollution généralisée et l’explosion des cas de cancer de la prostate. Comme le dit un syndicaliste pompier : « Ils ont bien décidé une dérogation pour le chlordécone, c’est donc possible pour l’obligation vaccinale »...
Si la vaccination demeure le meilleur moyen de lutter contre la pandémie de covid et de sauver des vies (ce dont les soignantEs de Guadeloupe, vaccinéEs à près de 90 %, ont bien conscience), les mesures de contrainte et de sanctions sont non seulement autoritaires mais inefficaces : rien ne saurait remplacer la prévention et la conviction.
Répondre aux inégalités et à la crise sociale
Derrière ce refus de la gestion autoritaire de la crise sanitaire par le pouvoir macroniste, les racines sociales de la mobilisation sont profondes. C’est la raison pour laquelle les collectifs de Guadeloupe et de Martinique ont mis en avant un cahier de revendications qui fait ressortir toutes les exigences face aux inégalités et à la misère vécue par la population. Ainsi, en Guadeloupe, on trouve parmi les revendications « l’augmentation généralisée des salaires, des minima sociaux, des allocations chômage et des pensions de retraite en même temps que l’augmentation des prix », mais aussi « l’arrêt des licenciements, dans le privé et des suppressions de postes, dans le public » ou encore « l’embauche massive de titulaires, dans toutes les fonctions publiques, à la poste, dans les écoles, à l’université ».
Il faut dire qu’en Guadeloupe, 33 % de la population vit sous le seuil de pauvreté (contre 14 % en France métropolitaine), le taux de chômage est de 21 % et la pandémie n’a fait qu’aggraver la situation. De plus, les prix alimentaires sont de 33 % plus élevés qu’en métropole, sans parler des prix d’internet et de nombreux biens directement importés par les grands groupes de distribution. Les problèmes posés par la grande lutte de 2009 ne sont donc pas réglés, et le Medef local ne s’est jamais senti obligé d’appliquer la prime de vie chère de 200 euros à touTEs les salariéEs, obtenue suite à cette longue mobilisation.
Refuser le traitement policier de la crise sanitaire et sociale
Pourtant, au lieu d’expliquer cette réalité, les médias ne se font l’écho que des « violences des manifestants » avec des images d’immeubles incendiés et de magasins pillés... Et le premier flic de France Darmanin vient d’envoyer 200 policiers et gendarmes supplémentaires, ainsi que 50 agents du Raid et du GIGN, portant à 2 250 le nombre de policiers et gendarmes présents sur l’île. Dans le même temps, le couvre-feu à 18 h a été établi sur toute l’île. Il s’agit bien de la gestion autoritaire d’une crise sociale par un gouvernement qui fait preuve d’un état d’esprit à proprement parler colonial, pouvoir qui méprise les exigences de la population de la Guadeloupe et de la Martinique.
Refusons le traitement policier de la crise sanitaire et sociale aux Antilles, énième symptôme des relations coloniales maintenues et de la dangereuse arrogance du pouvoir macronien. Solidarité avec les populations de Guadeloupe et de Martinique, soutien à la grève générale !