Le 14 août dernier ont eu lieu en Argentine « las PASOs », sorte de tour préliminaire aux élections présidentielles. Tous les partis qui veulent présenter un candidatE à la présidentielle doivent participer à ce premier tour, en présentant un ou plusieurs candidatEs. Les partis qui obtiennent 1,5 % (tous candidats internes confondus) sont qualifiés pour le premier tour.
Pour las PASOs, l’extrême droite est arrivée en tête avec 29,86 %, suivie de la droite à 28,11 % et des péronistes à 27,47 %. Ces derniers, actuellement au pouvoir, avaient choisi un candidat, Sergio Massa (21,40 %), particulièrement libéral, et d’ailleurs souvent comparé là-bas à Emmanuel Macron. Son opposant de gauche interne, Juan Grabois, n’a recueilli que 5,87 % des voix.
À droite, l’ancienne ministre de l’Intérieur, Patricia Bulrich, n’était qu’à 5 points au-dessus du candidat plus modéré Rodriguez Larreta. Bulrich, sorte d’Éric Ciotti argentine, était l’option la plus radicale et la plus répressive des deux candidats de droite. L’extrême droite est arrivée en tête du scrutin avec son seul candidat : Javier Milei. Sa victoire a été une surprise pour les médias et les instituts de sondages.
Milei, candidat libertarien
Milei a obtenu ce score dans le double contexte d’une inflation généralisée (autour de 10 % par mois) et d’un fait atroce qui a occupé toute l’attention des médias dans les jours qui ont précédé le scrutin (la mort d’une fillette de 11 ans des suites d’une agression pour vol).
Le programme de Milei, qui se dit « libertarien » (la presse le compare à Trump ou Bolsonaro), semblait la réponse toute trouvée à cette double crise économique et de sécurité. Il propose un libéralisme extrême : aucune régulation de l’économie et, pour contrôler l’inflation, une économie fondée à 100 % sur le dollar, alliée à une réduction des dépenses de l’État (en commençant par éliminer le ministère des Femmes). Quant au terrain social, il a annoncé que sa première mesure serait de mettre en prison les piqueteros, les chômeurEs qui s’organisent et bloquent les rues pour obtenir des aides sociales de l’État…
La candidate à la vice-présidence qui partage l’affiche avec Milei a, quant à elle, longtemps fait partie d’associations qui, entre autres joyeusetés, rendaient visite à l’ancien dictateur Videla lors de sa détention à domicile…
Le score de Milei s’explique aussi par des années de promesses non tenues de la part du péronisme (surtout depuis le dernier mandat de Cristina Kirchner) et de la droite libérale.
Une élection dans 3 mois à droite toute
C’est donc une élection « à droite toute ». Cela ne laisse rien préjuger de bon pour le scrutin final qui aura lieu dans 3 mois. Même si tout n’est pas joué.
Le résultat de l’extrême gauche est décevant même si lors des présidentielles le score de l’extrême gauche est plus bas à cause de la pression au vote utile. Le FIT-U (front de différents partis d’extrême gauche) obtient 2,63 %. Ce chiffre marque une stagnation prolongée, et la fin d’une dynamique, ce qui n’empêchera pas qu’ils continuent d’avoir des députéEs élus lors des élections législatives (au scrutin proportionnel). Les divisions internes, les disputes d’appareil entre le PTS et le PO (les deux principales forces du FIT), et surtout l’incapacité à mesurer la réalité du danger Milei, laissent des doutes sur leur capacité à mobiliser largement contre le fascisme.