Hocine Aït Ahmed a rejoint le Panthéon des grandes figures de l’histoire du peuple algérien, d’avant et d’après l’indépendance. Le Panthéon populaire qui se situe dans le cœur des masses, des humbles et des anonymes qui le prénomment affectueusement Dha El Hocine. Il est bien évidemment trop tôt pour tirer un bilan exhaustif et objectif de sa longue vie militante de 70 années. Un tel exercice demande un recul dont nous ne disposons pas encore. Mais une unanimité s’est d’ores et déjà réalisée pour souligner la profondeur et la constance de ses convictions politiques patriotiques et démocratiques, chèrement payées d’emprisonnements, de condamnation à mort et d’exil. Il s’avère en revanche déjà possible de tirer quelques enseignements politiques de la courte période qui va de l’annonce de sa mort à sa mise en terre dans son village natal, tant cette période a été riche. Notons d’abord que l’émoi suscité par l’annonce de son décès a largement dépassé le cadre de son village natal et de sa région, la Kabylie, pour toucher toute l’Algérie. Il a tout aussi largement dépassé le cadre d’une catégorie sociale, d’un sexe ou d’une tranche d’âge particuliers. Enfin il a dépassé, là aussi très largement, les frontières de son parti, le FFS, du courant démocratique et même des oppositions puisque le pouvoir lui-même a tenté, en vain, de récupérer sa disparition. L’impressionnante mobilisation populaire, le jour de son enterrement, a par ailleurs mis en évidence la disponibilité d’une importante force potentielle, parmi les jeunes en particulier, à poursuivre le combat pour une Algérie réellement indépendante et fondée sur la justice sociale et la démocratie. Une large mobilisation populaire qui a clairement exprimé son opposition au pouvoir. Il reviendra aux forces politiques qui s’inscrivent dans cette perspective de donner un contenu concret et mobilisateur afin de transformer ces potentialités en force effective de changement progressiste. Lamine Torki