La ligne de chemin de fer East Coast Main Line, qui relie Londres à Aberdeen, en Écosse, va passer temporairement sous le contrôle de l’État à partir du 24 juin, tant il est devenu évident que les compagnies qui possèdent la franchise, Virgin et Stagecoach, ne pourront pas verser les paiements prévus dans le contrat à 3,3 milliards de livres (3,8 milliards d’euros) signé il y a trois ans.
Cette récente annonce fait suite à une précédente déclaration du secrétaire au transports Chris Grayling, affirmant que la franchise se terminerait trois ans plus tôt que prévu, en 2020, ce qui permet aux opérateurs d’économiser 2 milliards de livres (2,3 milliards d’euros). Mais malgré cette débâcle, le gouvernement conservateur a expliqué que cela n’aurait pas d’impact sur la possibilité pour ces opérateurs d’obtenir de nouvelles franchises.
Bis repetita
C’est la troisième fois en dix ans que cette ligne est nationalisée, les offres d’exploitation privée ayant à chaque fois reposé sur des mensonges. Entre 2009 et 2015, la ligne a été exploitée par une entreprise possédée par le gouvernement, Directly Operated Railways (DOR), qui avait pris le contrôle de la franchise de l’opérateur privé National Express. Pendant cette période, DOR avait reversé des sommes d’argent significatives dans les comptes publics. Par exemple, en 2013-2014, le bénéfice avant impôt était de 225,3 millions de livres (258 millions d’euros) et ce sont 216,8 millions de livres (248 millions d’euros) qui avaient été reversés au département des Transports. C’est pourquoi l’annonce selon laquelle la franchise ne serait que temporairement dans le giron public est vue comme une imposture.
« Le secteur public prend les risques et les compagnies prennent les profits »
Andy McDonald, du Parti travailliste, a déclaré que le gouvernement avait « cyniquement reprivatisé » la ligne à la veille de l’élection de 2015, ajoutant : « Nous allons de renflouement en renflouement. Les compagnies ferroviaires y gagnent, les passagers et les contribuables y perdent. […] Et aucun bricolage ne pourra résoudre la faillite d’un système privatisé et brisé dans lequel le secteur public prend les risques et les compagnies prennent les profits. »
Les syndicats ferroviaires exigent de Grayling que la ligne reste dans le giron du public. Le secrétaire général du syndicat RMT [Rail, Maritime, Transports], a expliqué : « C’est la deuxième fois que le gouvernement en appelle au secteur public pour lancer une opération de sauvetage sur la côte est et, plutôt que de faire un arrangement temporaire, Chris Grayling devrait écouter son équipe et le public et le rendre permanent. »
En finir avec les privatisations
L’ensemble de l’industrie du rail est dans un état lamentable en Grande-Betagne, avec des compagnies qui s’en prennent aux conditions de travail des salariéEs ou qui ignorent les besoins des passagers handicapés et à mobilité réduite en essayant de se débarrasser des accompagnateurs sur de nombreuses lignes. Les prix augmentent, les retards et les annulations se multiplient, ce qui n’aide pas la Grande-Bretagne à réduire ses émissions de carbone puisque le recours aux transports routiers augmente. Et le désordre créé par le nombre importants de franchises rend difficile, et même ridiculement compliqué, d’organiser des voyages en train sur une longue distance.
C’est pourquoi le Parti travailliste de Jeremy Corbyn s’est engagé à renationaliser le rail. Il s’agit d’une prise de position extrêmement populaire, soutenue par près des 2/3 de la population. Le travailliste John McDonnell explique que le projet consiste à remettre sous contrôle public chacune des 25 franchises une fois qu’elles arriveront à leur terme, et d’en finir avec la séparation entre le rail et le transport, produite par la privatisation.
Veronica Fagan (traduction JS)