Quelques jours après un nouvel assaut violent de l’armée israélienne contre le camp de réfugiéEs de Jénine, nous publions des extraits d’un article de l’universitaire palestinien Abdaljawad Omar.
Au cours des deux dernières années, la résistance en Cisjordanie s’est battue pour son existence et sa survie, et il y a un certain nombre de raisons pour lesquelles le camp de réfugiéEs de Jénine est non seulement toujours debout, mais a évolué et s’est développé.
Les conditions du développement de la résistance
L’une de ces raisons réside dans le fait que la naissance des Lions [groupe armé] à Naplouse a largement préoccupé le Shabak [Service de sécurité intérieure israélien] en raison de la proximité géographique de Naplouse avec les blocs de colonies du nord de la Cisjordanie, ce qui signifie qu’une présence armée à Naplouse représentait un danger plus important pour la vie quotidienne des colons dans la région. C’est pourquoi le gros de la stratégie anti-insurrectionnelle des forces d’occupation s’est concentré sur la région de Naplouse, réussissant quelque peu à contenir le phénomène — du moins dans sa forme initiale, car les Lions ont été ébranlés par l’usure de leurs effectifs et leur incapacité à construire un refuge qu’il pourrait fortifier avec différents outils défensifs.
La deuxième raison du succès relatif de Jénine est liée au type de relations organisationnelles qui existaient dans le camp et à leur capacité à maîtriser les conflits internes. Cela a permis de protéger la résistance contre les interventions de l’Autorité palestinienne, telles que la propagation de rumeurs, l’instauration de la méfiance ou même les tentatives de séduire les résistants eux-mêmes. En d’autres termes, l’existence de certaines conditions sociales et politiques dans le camp de réfugiéEs de Jénine a contribué à la construction d’une conscience sociale générale qui a soutenu la résistance et est restée hostile à tout discours politique tentant de la miner.
Vers une intensification des affrontements ?
Enfin, la troisième raison est liée aux types de tactiques employées par l’ennemi pour contenir et vaincre les groupes armés — des interventions rapides faisant principalement appel à des forces spéciales sur la base de renseignements spécifiques, ce qui signifie que ce type d’opérations s’est produit par intermittence et n’a pas porté de coups décisifs aux capacités de la résistance à persévérer. L’armée ne s’est pas engagée dans de vastes campagnes d’arrestations à Naplouse et à Jénine parce qu’elle ne voulait pas sacrifier ses soldats, mais elle craignait aussi que la lutte ne s’étende à l’ensemble de la société palestinienne et elle voulait éviter d’être condamnée pour les meurtres de sang-froid qu’elle aurait perpétrés. Les unités d’opérations spéciales ont donc été vues comme une solution, même lente. Cela a permis à la résistance de développer toute une infrastructure dans le camp de réfugiéEs de Jénine.
Nous ne savons pas ce que les prochains jours nous réservent, ni comment le phénomène de la résistance armée se développera à Jénine. Nous ne savons pas non plus si les termes de l’engagement resteront limités à deux parties tentant d’éviter une confrontation directe, ou si les choses s’intensifieront au-delà de ce point. Mais ces derniers jours ont donné un aperçu de la résurgence de la résistance dans le camp de réfugiéEs de Jénine. La persistance de ce phénomène restera une source d’inquiétude pour beaucoup, en particulier pour les forces qui s’y opposent, car il démontre qu’un camp de réfugiéEs étroit, aux capacités limitées et sans beaucoup de soutien, oblige une armée entière à avancer à pas de tortue.
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