Publié le Jeudi 28 septembre 2017 à 10h15.

« L’Amérique d’abord » ou les tensions libérales et impérialistes

À l’occasion de la 72e assemblée générale des Nations unies, le 19 septembre, Trump a fait la promotion de sa politique militariste et nationaliste, proférant menaces et insultes à l’égard de tous les « États voyous » qui contestent l’hégémonie étatsunienne, en premier lieu la Corée du Nord.

Trump n’y est pas allé par quatre chemins : « Les États-Unis ont une grande force et une grande patience, mais si nous sommes forcés de nous défendre ou de défendre nos alliés, nous n’aurons d’autre choix que de détruire totalement la Corée du Nord. L’homme-fusée est en mission suicide. Les États-Unis sont en mesure de frapper, mais j’espère que cela ne sera pas nécessaire.» Et de poursuivre : « L’Amérique, c’est le bien », « nous aurons l’armée la plus puissante que nous ayons jamais eue », etc. 

Politique des tensions

Ce discours belliciste, manichéen et grossier, ne s’adresse pas qu’à la Corée du Nord et à son dictateur, mais aux peuples du monde entier. Il définit la stratégie des USA, sans fard. Trump renoue avec l’« axe du mal » de George W. Bush et agresse aussi l’Iran accusé de « soutenir les terroristes » Il a éreinté une nouvelle fois l’accord de 2015 sur le programme nucléaire considéré comme « une honte ». « Nous ne pouvons pas respecter un accord s’il sert à couvrir l’éventuelle mise en place d’un programme nucléaire », a-t-il assuré, alors que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) assure que l’Iran respecte ses engagements. Et Trump de déclarer au lendemain du test d’un nouveau missile d’une portée de 2 000 kilomètres annoncé samedi dernier par Téhéran : « L’Iran vient de tester un missile balistique capable d’atteindre Israël. Ils travaillent aussi avec la Corée du Nord. Nous n’avons pas vraiment un accord ! » 

Les attaques renouvelées contre le Venezuela ont été l’occasion de démagogie anticommuniste primaire : « Partout où le socialisme ou le communisme ont été appliqués, ils ont apporté l’angoisse, la dévastation et l’échec. » Et Trump s’est dit prêt à tout pour que les Vénézuéliens puissent « récupérer leur liberté, remettre le pays sur les rails et renouer avec la démocratie », en clair se plier à la volonté des USA.

Macron : la France joue son jeu

Macron a, quant à lui, voulu profiter de sa première intervention à l’ONU pour affirmer sa stature d’homme d’État, celui qui ramènerait Trump dans le droit chemin de la raison... « Partout où le multilatéralisme se dote des armes de son efficacité, il est utile », prétend-il, utile « à réconcilier notre intérêt et nos valeurs, notre sécurité et le bien commun de la planète ». Langage différent mais objectif commun : la défense des intérêts des grandes puissances alliées des USA, accompagnée d’une défense de l’ONU qui « a été fondée dans un but très noble mais ces dernières années n’a pas atteint son plein potentiel, à cause de la bureaucratie et d’une mauvaise gestion ».

En réalité, depuis ses origines à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’ONU a toujours été utilisée par les États-Unis et les grandes puissances victorieuses pour assurer leur hégémonie sur le monde et justifier leurs interventions militaires au nom d’un prétendu droit international. Elle a toujours été sous la houlette du Conseil de sécurité au sein duquel des membres permanents (les États-Unis, la Russie, la France, le Royaume-Uni, la Chine) disposent d’un droit de veto. Et quand des résolutions contraires à leur politique peuvent être adoptées, elles restent lettres mortes comme celles condamnant la politique israélienne contre les Palestiniens.  

À l’ONU, Trump a parlé sous le contrôle du Pentagone. Certes avec sa brutalité et sa vulgarité, mais, sur le fond, il a assumé la politique des généraux qui l’entourent, un nationalisme militariste au service des intérêts des multinationales étatsuniennes. Il invoque la « souveraineté » nationale, pilier, avec « la sécurité » et « la prospérité », d’un ordre fondé sur « un grand réveil des nations » face à un monde « multipolaire » où règne une concurrence acharnée.

Trump n’a pas liquidé « le leadership moral » des USA comme l’en accuse Hillary Clinton : il n’est que le produit de l’effondrement de cette hypocrisie institutionnalisée construite par la propagande impérialiste, et ruinée par Obama. Trump se complaît avec cynisme à dire ce qu’il était bien difficile de cacher : la guerre est le principal instrument de la politique étrangère des USA. 

Yvan Lemaître