Le Labour Party Pakistan (Parti du travail) a tenu son sixième congrès les 7 et 8 avril derniers à Lahore. Un congrès ponctué, comme toujours en ce pays, de poèmes chantés – avec cette fois-ci la participation remarquée d’un artiste de renom national, Adeel Burki, reprenant les œuvres de Faiz Ahmad Faiz, grande figure politico-culturelle de la gauche pakistanaise.
Le congrès et ses 140 déléguéEs avaient à leur ordre du jour l’analyse de la crise capitaliste internationale et de la situation au Pakistan. Les débats se sont concentrés sur la question nationale dans ce pays composé d’une mosaïque de populations rassemblées plus ou moins artificiellement dans un même État en 1947, lors de la partition de l’Empire des Indes britannique. Mais les principales décisions ont concerné la consolidation du LPP en tant que parti. Ce dernier a en effet connu en une décennie un développement très significatif (recrutement, implantation sociale, extension géographique…), mais avec une ossature organisationnelle dangereusement faible. Depuis un an déjà, un gros effort a été consenti pour lui assurer une base financière plus consistante, alors que dans le passé, le nombre de cotisants était très faible par rapport à celui des adhérentEs. De même, le LPP va retrouver des locaux qui lui seront propres, alors qu’il est actuellement hébergé par des ONG progressistes.
Un nouveau comité fédéral a été élu, de 25 membres (dont seulement quatre femmes), avec un renouvellement des responsabilités les plus en vue, Nisar Shah (ancien secrétaire général) et Farooq Tariq (ancien porte-parole) ayant accompli leurs deux mandats successifs. Le nouveau secrétaire général, Younas Rahu, originaire du Sind (dans le sud du pays) et non du Pendjab, est un militant trempé dans les luttes syndicales et ouvrières qui a intégré la direction du LPP en 1999.
Nous étions deux invités internationaux présents au congrès, Toni Iltis pour l’Alliance socialiste d’Australie et moi-même, pour la Quatrième Internationale – une présence solidaire particulièrement appréciée à l’heure où le LPP et les mouvements sociaux subissent des attaques répétées. Ainsi à Okara, dans le centre, j’ai pu apporter un salut internationaliste à un rassemblement de 6 000 paysans en mémoire de trois des leurs, abattus par l’armée. À Gilgit au Nord et à Faisalabad au Pendjab, cadres politiques et dirigeants syndicaux du textile sont soumis aux juridictions anti-terroristes. À Karachi, au Sud, d’autres syndicalistes sont accusés de gangstérisme ! À Hyderabad, une manifestation unitaire des forces de gauche contre l’enlèvement et la conversion forcée de jeunes femmes hindoues a été violemment agressée par une organisation fondamentaliste, avec la complicité de la police. Dans la vallée de Swat, au Nord-Ouest, le parti se construit sous la menace croisée de l’armée et des talibans.
C’est ce Pakistan des luttes qu’il convient de mieux faire connaître en France.
Pierre Rousset