Les crise politique du Sénégal vient de loin. Le second mandat de Wade en 2007 était déjà entaché de fraudes électorales, dès cet instant, les Sénégalais avaient compris que Wade ferait tout pour rester au pouvoir. Au printemps 2011, il avait tenté de réformer la Constitution en instaurant un système de « ticket » avec un président, un vice-président, et la possibilité de gagner les présidentielles dès le premier tour avec plus de 25 % des voix. La ficelle était un peu grosse. En effet, tout le monde avait compris que le but était de transmettre le pouvoir à son fils Karim qui détient déjà un super-portefeuille ministériel regroupant l’Aménagement du territoire, la Coopération internationale des transports aériens et des infrastructures. Les manifestations massives avaient obligé le pouvoir à abandonner le projet et avaient donné naissance au Mouvement du 23 juin.
La Constitution de 2008 limite les mandats présidentiels à deux. En toute logique, Wade ne peut donc pas briguer un troisième mandat. Cependant le Conseil constitutionnel s’est rangé à l’argument du clan présidentiel : le premier mandat ne compte pas puisqu’antérieur à la Constitution. Cette décision a provoqué une explosion de colère dans tout le pays, renforcée par le rejet de la candidature du chanteur Youssou N’Dour. L’acharnement du clan Wade à rester au pouvoir laisse augurer de nouveau des fraudes massives lors du scrutin présidentiel qui doit avoir lieu le 26 février 2012.CorruptionBénéficiant d’une réelle assise populaire, Wade avait réussi en 2000 à renverser le pouvoir détenu depuis l’Indépendance par le Parti socialiste, archétype parfait du parti néocolonial servant les intérêts des impérialistes de l’ancienne puissance coloniale. Du slogan de la campagne « Soppi » qui signifie « changement » en wolof, les populations sénégalaises ont vite déchanté. La politique économique et sociale du gouvernement n’a pas changé et la corruption s’est considérablement aggravée.
Entre inflation galopante et pillage des ressources halieutiques (pêche) et des terres, les Sénégalais vivent au rythme des délestages d’électricité qui peuvent durer des heures entières et touchent les plus pauvres qui n’ont pas les moyens de s’acheter un générateur. Ces délestages nuisent aux petites activités économiques du secteur informel et présentent des risques sanitaires dus à la rupture de la chaîne du froid pour les aliments. RépressionDes quatorze candidatures avalisées par le Conseil constitutionnel, la plupart sont des anciens ministres des gouvernements Wade. Moustapha Niasse investi par « Benno Siggil Senegaal » (Unité pour développer le Sénégal), soutenu par la gauche sénégalaise, n’échappe à la règle. Quant au Parti socialiste, il est représenté par Ousmane Tanor Dieng.
Le pouvoir a vite et bien compris le danger des mobilisations contre le troisième mandat de Wade et tente de l’étouffer par la répression. De nombreux militants du Mouvement du 23 juin ont été arrêtés. Les forces de police et de gendarmerie sont déployées dans toutes les grandes villes du pays, Thiès, Saint-Louis et Dakar la capitale, attaquant brutalement les manifestations.
Il n’est pas sûr que cette répression réussisse à venir à bout de l’exaspération croissante des populations et Wade risque de dégager plus vite que prévu.
Paul Martial