Publié le Jeudi 13 décembre 2012 à 19h15.

Syrie : Armes chimiques et intervention impérialiste contre la révolution populaire

Sur fond de grandes manœuvres des pays impérialistes, le massacre du peuple syrien continue. Mais le processus révolutionnaire, populaire et profond, résiste.L’Otan a décidé le déploiement de missiles Patriot du côté turc de la frontière. Le régime syrien a reçu des missiles Iskander équivalents à ceux des Américains, et trois navires de guerre russes ont accosté à Tartous. Ces manœuvres des puissances américaine et russe déboussolent une partie de la gauche, y compris radicale, qui craint une intervention occidentale. Comme le montrerait le fait qu'une partie de l’opposition en Turquie (le CNS) appelle à une zone d’exclusion aérienne ou à des zones sécurisées, la crainte de la « poussée jihadiste », le déploiement des missiles Patriot, l’avertissement américain concernant l’utilisation d’armes chimiques par le pouvoir syrien, et les récentes déclarations de Clinton et d’Obama…

Le jeu des grandes puissancesLe régime de Damas a été le premier à parler d’armes chimiques, dès le 24 juillet, et menaçait de leur utilisation en cas d’« invasion militaire étrangère ». Les puissances occidentales n’ont pas apporté d’aide militaire à la résistance, et le massacre du peuple continue aujourd'hui au moyen des armes russes et iraniennes : plus de 50 000 tuéEs, des dizaines de milliers de blesséEs, des quartiers, des villes et des villages rasés et 3 millions de déplacéEs. Face aux États-Unis et à Israël, le gouvernement a affirmé la maîtrise de ses armes. Aucune puissance ne souhaite une victoire de la révolution qui aurait valeur d’exemple pour les peuples de la région, notamment dans les pétromonarchies.Depuis leur accord du 30 juin, les États-Unis et la Russie envisagent un plan de « transition négociée », en tentant de protéger leurs intérêts et d’éviter l’embrasement régional. La Russie s’oppose à toute intervention militaire occidentale ou turque. Quant aux Américains, les coûts et les conséquences d’une intervention seraient préjudiciables à leurs intérêts, d’autant que le régime syrien leur rend service en détruisant les infrastructures et en affaiblissant les capacités militaires du pays. Initiés à Dublin le 6 décembre pour chercher une issue « politique » à la « crise syrienne », les entretiens entre S. Lavrov et H. Clinton en présence de L. Brahimi, se sont poursuivis à Genève le 9 et pourraient déboucher sur un accord.

Une résistance populaire et arméeLes forces sociales motrices de la révolution sont les ouvrierEs, les salariéEs, les exploitéEs et les paysanNEs pauvres. Les quartiers et les villes ouvrières et populaires qui se sont révoltés les premiers sont aussi les zones les plus ravagées par l’armée du pouvoir. Cette révolution se distingue des autres révolutions dites arabes par deux aspects : les classes exploitées et révoltées créent leurs organes d’auto-organisation (les coordinations) et des embryons d’organes d’auto­gestion (les conseils locaux).La résistance armée n’est que la conséquence de la brutalité inouïe de la dictature envers la population pacifique. Elle est populaire car elle est portée par le peuple. La résistance populaire comprend plus de 70 000 combattants et n’a pas délaissé la lutte pacifique : chaque jour, des centaines de manifestations traversent les villes. Les groupes soutenus par l’Arabie saoudite et le Qatar (environ 4 000 jihadistes) y sont minoritaires.Les forces de répression ont assassiné, emprisonné ou acculé à l’exil les militants de gauche et les démocrates révolutionnaires. Pourtant, ces forces sont toujours présentes et actives, la montée islamiste restant marginale. Et aucune force politique n’a de rôle dirigeant ou hégémonique dans le mouvement populaire.En se lamentant sur le fantasme d’une récupération de la révolution par la contre-révolution, ou en brandissant la menace d’une imminente intervention militaire, une partie de la gauche justifie sa passivité ou sa complicité avec une dictature bourgeoise sanguinaire, et associe la lâcheté morale à l’aveuglement politique. La gauche radicale internationale doit soutenir concrètement ce processus révolutionnaire authentique.Ghayath Naisse