Vendredi 30 octobre s’est réunie une conférence internationale des puissances mondiales et régionales qui considèrent avoir leur mot à dire sur la situation en Syrie. Elles ont parlé de paix... mais leurs actes continuent d’enfoncer le peuple syrien dans un enfer qui nie ses droits élémentaires.
«Les participants » – États-Unis, Russie, Chine, UE, Allemagne, France, Royaume-Uni, Italie, Égypte, Iran, Irak, Jordanie, Liban, Oman, Qatar, Arabie saoudite, Turquie, Émirats arabes unis ainsi que l’ONU – ont tenu pendant huit heures « une discussion franche et constructive » dans le but de mettre fin à la violence en Syrie. Dans un communiqué commun, ils se sont félicités qu’au-delà de divergences importantes, ils ont atteint une « compréhension mutuelle » pour protéger l’intégrité territoriale de la Syrie, les institutions de son État, les droits de tous les Syriens quelles que soient leurs origines.
Ils se sont engagés à accélérer les efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre et permettre l’accès le plus large à l’aide humanitaire. Dans le même mouvement, il s’agit de vaincre Daech, le tout pour permettre un processus démocratique d’élections et de nouvelle Constitution rassemblant les composantes syriennes « non sectaires » sous l’égide de l’ONU. Pour mettre en place ce processus politique, l’ONU doit convoquer les représentants du gouvernement et de l’opposition politique syrienne. Les ministres des pays représentés continuent à travailler sur les points restant divergents – dont la question du départ d’Assad – et vont se revoir dans quinze jours, en principe pour avancer sur un cessez-le-feu concret. Et tous d’assurer la main sur le cœur que le processus doit rester entre les mains des Syriens !
L’offensive russe
Les populations syriennes – révoltées contre l’absolutisme, écrasées sous les bombes, déplacées dans des conditions terribles – ne peuvent que constater l’abîme entre ces préoccupations et la réalité nue : une détermination absolue du clan de Bachar el-Assad à rester au pouvoir par les moyens les plus atroces, avec l’aide des régimes de la Russie et de l’Iran.
Face à cela, restent des « amis » moyen-orientaux et occidentaux qui n’ont permis qu’aux plus obscurantistes des opposants de développer leurs forces militaires et de les retourner contre les populations ; des « amis » qui n’aident que de façon dérisoire les réfugiés ; et des pompiers pyromanes dont les « frappes aériennes » ont servi à Poutine pour justifier son offensive actuelle pour sauver le régime.
Après un mois de cette offensive menée avec les forces d’Assad, de l’Iran et du Hezbollah, il apparaît que les principaux visés ne sont pas les troupes de Daech, mais les forces du soulèvement syrien dans toutes ses composantes, et les populations civiles. Les bombardements russes ont eu lieu dans 10 des 14 régions syriennes, ont fait plus de 600 morts et des milliers de blessés graves dont de nombreux enfants, ont visé au moins 12 hôpitaux, de nombreux autres bâtiments civils et des marchés à l’heure d’affluence, et ont provoqué de nouveau la fuite de plus de 100 000 habitants. Grand organisateur de l’écrasement de la Tchétchénie entre 1994 et 2004, Poutine donne une leçon à Assad (comme aux États-Unis qui ont déjà exercé leurs talents particuliers en Afghanistan et en Irak), tout en cherchant un accord avec les deux. Mais, malgré la disproportion des forces, cette offensive semble rencontrer quelques difficultés sur le terrain.
Par ailleurs, s’il s’avère que le crash dans le Sinaï d’un Airbus A321 d’une compagnie charter russe reliant Charm el-Cheikh à Saint-Pétersbourg – crash qui a provoqué la mort de 224 personnes – est dû à un attentat, le soutien de la population russe pourrait être remis en question.
Mais quelle que soit l’évolution de la situation, le peuple syrien a besoin de notre soutien.
Jacques Babel