L’« élection » présidentielle en Syrie a eu lieu le 3 juin. Pour cette élection, deux autres candidats, « inconnus » à côté du dictateur, n’ont pas osé mettre sur les panneaux électoraux qu’ils étaient candidats à la présidence...
Pire, cette élection était restreinte à la zone de contrôle de l’armée régulière, une élection qui a tout d’un plébiscite et qui a donné au dictateur en place 88,7 % des voix. Pendant cette période électorale, les barils n’ont pas cessé de tomber sur les zones « libérées », le régime ne se gêne plus pour gazer sa population, cette fois par le gaz chlore CL2. La dernière frappe a eu lieu le 4 juin contre la localité de Arbine, dans la campagne de Damas. Les grandes puissances se comportent comme si le dictateur faisait partie de toute solution « politique »... tout en disant qu’il n’aura pas de place dans l’« avenir » de la Syrie ! Ainsi , l’ex-ambassadeur étatsunien à Damas, responsable du dossier de l’opposition, a déclaré le 4 juin que son administration n’a pas apporté de soutien « ayant un effet sur les terrains », soulignant qu’aujourd’hui l’enjeu n’est plus le départ d’Assad mais « les menaces grandissantes des extrémistes ». Et l’arène diplomatique internationale et régionale s’active : USA-Iran, Arabie saoudite-Iran etc. Le but est d’arriver à un arrangement entre les grandes puissances internationales et régionales, pour juguler l’élan révolutionnaire dans la région et conserver les régimes en place, y compris le régime syrien, demandant seulement que le tyran constitue un gouvernement élargi comprenant des « opposants ».
Révolution, contre-révolution et résistancesLa contre-révolution est multiple : en plus du régime et ses milices diverses, il y a les multiples groupes djihadistes qui répriment les masses populaires et révolutionnaires dans leurs zones de contrôle, et s’opposent entre eux pour les richesses, en particulier le contrôle des puits pétroliers. Qu’il soit pacifique ou armé, le mouvement populaire connaît un recul évident depuis la fin de l’année dernière. Ce mouvement révolutionnaire fait face à de multiples ennemis, seul, sans mouvement de solidarité réel et efficace. Nous sommes dans une phase d’avancée des contre-révolutions, pas seulement en Syrie, et dans un reflux de mouvement révolutionnaire. Pour autant, il serait prématuré de parler de défaite, car les masses syriennes reprennent à nouveau les slogans originels de la révolution populaire, toutes illusions sur les mouvements « islamistes » étant largement dissipées : pour une Syrie libre et démocratique pour tous les Syriens, l’égalité et la justice sociale ! Les manifestations et autres actes de contestation continuent : dans la ville de Airaqa contre la présence de mouvements islamistes en avril, ou la grève générale dans la ville de Minbij au mois de mai. Les contestations populaires n’ont pas cessé dans les zones contrôlées par le régime : des comités de coordination ont réalisé une élection parallèle le 3 juin dans plusieurs villes du pays, élection où les candidats étaient les martyrs de la révolution populaire, en particulier Ghaiath Matar, activiste pacifiste de la ville de Darya arrêté le 6 septembre 2011 et mort sous la torture. Cette élection parallèle a eu beaucoup de succès mais les médias dominants l’ont ignorée. Plusieurs manifestations ont aussi eu lieu le 6 juin dénonçant le simulacre d’élection présidentielle sous le mot d’ordre : « ce n’est pas une élection, c’est une comédie dans une mer de sang ». La gauche révolutionnaire syrienne est activement impliquée, dans des conditions les plus difficiles et face à des ennemis nombreux, dans toutes les formes des luttes populaires, qu’elles soient dans les zones « libérées » ou sous contrôle du régime. La contre-révolution avance, la révolution résiste et continue !
Ghayath Naisse