Le gouvernement Milei avait obtenu un premier vote majoritaire à la Chambre des députés sur la globalité de son projet de « loi omnibus ». Il en avait auparavant retiré plus de la moitié des articles initialement prévus.
La semaine dernière, la négociation avec les députés du « centre » était arrivée à un point mort, car les demandes de compensations pour atténuer l’impact financier dans les provinces n’ont pas été acceptés par le gouvernement. Finalement, lors du le vote de la loi article par article, le gouvernement s’est retrouvé en minorité sur plusieurs points. Le gouvernement a brusquement retiré du vote l’ensemble du projet de loi et l’a renvoyé en commission. Ceci implique un retour au « point zéro », et tout ce qui avait été approuvé est annulé. Tout indique que dans les faits cette loi soit définitivement abandonnée.
Désaccord au sein de la bourgeoisie
C’est incontestablement une défaite pour le gouvernement, et en ce sens une bonne chose pour la population. Ce n’est pas pour autant une victoire du peuple argentin. Certes, les mobilisations de décembre et surtout le succès des manifestations du 24 janvier (avec même des rassemblements devant de nombreuses ambassades dans le monde) ont sûrement pesé sur les hésitations des députés « centristes », sur les réponses du gouvernement, et donc sur la crise politique. Il y a eu également des manifestations, violemment réprimées, devant le Congrès pendant les débats au Parlement, convoquées par les organisations de la gauche radicale. Les forces syndicales et péronistes officielles, elles, en étaient absentes.
Même si nous nous réjouissons de l’abandon de cette loi, nous considérons que ce n’est qu’un début. D’abord parce que l’échec de Milei est essentiellement dû aux désaccords au sein des secteurs bourgeois sur la façon de répartir les moyens dégagés par les mesures ultralibérales et austéritaires. Ensuite, parce que ceci n’implique pas que le gouvernement ait renoncé à ses réformes réactionnaires. En représailles du blocage, même partiel, des gouverneurs, le gouvernement a supprimé les subventions aux transports dans les provinces, ce qui veut dire qu’à nouveau ce sont les travailleurEs et les secteurs populaires qui payent le prix de la crise.
Une épreuve de force à venir ?
Quoi qu’il en soit une nouvelle étape s’ouvre et le gouvernement de Milei va devoir choisir entre plusieurs options.
Le gouvernement Milei peut décider de gouverner en se contentant de faire voter les lois une par une, ce qui sera long et pas facile après l’affrontement avec les centristes. Étant donné la dégradation rapide de la situation économique et sociale, cela peut provoquer une usure tout aussi rapide de son crédit.
Une deuxième possibilité, qu’il a déjà évoquée, c’est celle de faire passer la loi par référendum. Mais cette solution comporte le risque d’unifier l’opposition, de mobiliser toutes les forces militantes, d’approfondir la polarisation et la politisation de la population.
Enfin il peut aussi donner un nouveau coup de barre à droite, appliquer de façon autoritaire les mesures, en passant outre le Parlement et en mobilisant son arsenal répressif ainsi que ses nombreux soutiens au sein de l’appareil d’État et des cercles influents de la bourgeoisie. Mais cela impliquerait une épreuve de forces directe avec la population et les travailleurEs qui ont déjà montré qu’ils ne se laisseraient pas faire.
Commission Amérique latine du NPA