Après une participation record lors des élections présidentielles du 7 octobre, c’est l’inverse qui s'est produit lors des élections régionales du 16 décembre. Avec une abstention de 46%, nous sommes loin du résultat des dernières élections régionales de 2008 qui s’étaient soldées par moins de 35% d’abstention. Malgré cela, la majorité gouvernementale gagne 20 États, n’en laissant que 3 à l’opposition, Miranda, Lara et Amazonas. Ces résultats sont à comparer avec les 5 États que détenait la droite depuis 2008. Les États clefs de Tachira, Carabobo et de Zulia basculent dans le camp chaviste qui bénéficie de la dynamique du 7 octobre et du courant de compassion envers Chavez, touché à nouveau par le cancer. Parmi les 20 gouverneurs élus du Grand pôle patriotique, nom de la coalition des partis soutenant Chavez, 11 sont des ex-militaires, fidèles depuis longtemps et ayant pour certains participé au coup d’état chaviste de 1992. Une opposition diviséeL’État d’Amazonas reste aux mains de l’opposition, traditionnellement dirigé par le PPT (Patria Para Todos), qui s’est allié à la MUD lors des élections régionales partielles de 2010. Le PPT a élu une nouvelle direction en 2011 invalidée par la justice, ce qui a donné lieu à une scission et à la création du MPV. Le PPT « historique » réalise 0,33 % des voix en Amazonas, tandis que le candidat de la MUD, membre du MPV (Movimiento Progresista de Venezuela) remporte l’État, mais avec 34,62 % des voix sur son seul parti. Quant à Capriles, candidat de la MUD (Mesa de la Unidad Democratica) aux présidentielles, il a gagné son pari de garder l’État de Miranda aux mains de l’opposition. Opposé à Elias Jaua du PSUV, pourtant donné gagnant dans tous les sondages, Capriles l’emporte après avoir mené une campagne publique très ancrée à droite, contre le « castro-communisme » censé envahir l’État !Mais dans les rangs de l’opposition commencent à apparaître publiquement les signes de divergences. Ramon Guillermo Aveledo, secrétaire général de la MUD appelle à « des journées de réflexion sur les défaites de l’opposition » et à « faire une révision profonde ». Dans le même sens, les responsables d’officines d’enquêtes d’opinion demandent à l’opposition de réviser « ses dirigeants » et indiquent qu’une cause des défaites du 7 octobre et du 16 décembre est l’absence d’identité et de programme clair.Une majorité devant les difficultés ?Les anciens partis, l’AD (Acción Democrática, social-démocrate) et le COPEI (Comité de Organización Política Electoral Independiente, droite), marginalisés lors des présidentielles, cherchent désormais à faire entendre leur voix. Alors que les élections législatives de 2010 laissaient entrevoir une possible victoire de la droite aux élections suivantes, cette perspective recule et les bilans sont exigés. La défaite qu’elle vient de subir à ces élections régionales est brutale avec la perte de trois états jugés difficilement accessibles par la gauche, Zulia, Carabobo et Nueva Esparta.Dans le camp gouvernemental, cette réussite aux régionales risque de masquer les difficultés à venir. La peur d’un retour de la droite, qui a payé lors des présidentielles, ne saurait servir de politique. Les attentes de la population sont nombreuses et l’abstention aux régionales exprime un détachement vis-à-vis des promesses des candidats. Plus que jamais, l’approfondissement du processus devient urgent et nécessaire. Notamment si Chavez se retire de la vie politique, soit en raison de sa maladie, soit en cas de décès. L’avenir de la révolution bolivarienne en dépend.Patrick GuillaudatAuteur avec Pierre Mouterde de Hugo Chavez et la révolution bolivarienne, M éditeur, 2012, 24 euros.
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