Emmanuel Macron l’a annoncé par voie de tweet lundi 4 février au matin : « Les Vénézuéliens ont le droit de s’exprimer librement et démocratiquement. La France reconnaît Juan Guaidó comme "président en charge" pour mettre en œuvre un processus électoral. » Une déclaration qui fait suite à « l’ultimatum » que le président français avait lancé, quelques jours plus tôt, au côté de certains de ses « partenaires » européens, à Nicolás Maduro, le sommant d’organiser une nouvelle élection présidentielle.
En décidant d’apporter son soutien à Guaidó, Macron et son gouvernement ont choisi de légitimer rien moins qu’un putsch, déjà soutenu par Trump et les droites et extrêmes droites d’Amérique latine. Nul besoin en effet de figurer parmi les soutiens de Maduro (que nous ne sommes pas) pour comprendre que le coup de force de l’opposition vénézuélienne, qui prend appui sur l’exaspération légitime face aux politiques désastreuses du successeur de Chávez, n’augure rien de bon pour le Venezuela et, au-delà, pour une région dans laquelle l’expérience des dictatures est si récente, et où des Jair Bolsonaro entendent jouer des rôles de premier plan, avec l’appui de l’impérialisme US dont il n’est nul besoin de rappeler le CV en Amérique latine.
À l’irresponsabilité s’ajoute en outre l’hypocrisie, comme lorsque le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian déclare que « ce n’est pas de l’ingérence à partir du moment où il y a une crise dans un pays [et] qu’il y a un appel du président Guaidó à le soutenir pour rétablir la démocratie ». Les autorités françaises, amies des autocrates et fournisseuses officielles d’armes pour des États qui figurent parmi les pires dictatures de la planète, de l’Arabie saoudite à l’Égypte, seraient-elles soudain devenues des chantres du « rétablissement de la démocratie » ?
Il n’est pas nécessaire d’être grand clerc pour comprendre que le gouvernement français se moque tout autant du sort des VénézuélienEs que de celui des Yéménites, et n’obéit qu’à des logiques impérialistes destinées à défendre les prétendus « intérêts de la France ». La population vénézuélienne, à laquelle nous apportons toute notre solidarité, aspire avant tout à décider par elle-même de son avenir, et mérite mieux que d’être prise en otage et mise en danger par un Macron dont les leçons de démocratie, au regard de ses alliances à l’étranger et de sa politique intérieure de plus en plus répressive, font décidément rire… jaune.
Julien Salingue