Le parti de Nicolás Maduro a remporté, dimanche 10 décembre, plus de 300 municipalités sur les 335 en jeu. Cette victoire, obtenue grâce au boycott des trois principaux partis d’opposition, ne lève aucune des grandes incertitudes qui hypothèquent l’avenir du Venezuela.
Après le cycle de manifestations et de violences à l’origine de la mort de 124 personnes entre avril et juillet dernier, on pourrait croire qu’une telle victoire aux élections municipales réaffirme le pouvoir de Nicolás Maduro. Mais il n’en est rien.
Une opposition pro-Empire
Ce scrutin s’est tenu avec une abstention de 52 % en l’absence des trois principaux partis d’opposition. Ceux-ci protestaient contre des irrégularités au scrutin régional d’octobre (déplacement de centaines de milliers d’électeurs deux jours avant le scrutin) et ne voulaient pas se mettre une nouvelle fois en position de faiblesse, avec une division entre ceux qui veulent s’accorder avec le gouvernement Maduro pour obtenir quelques positions de pouvoir et ceux qui maintiennent une -stratégie insurrectionnelle.
Si l’opposition ne parvient pas à mobiliser la population vénézuélienne, elle jouit d’un soutien sans faille des élites impérialistes. Mercredi 13 décembre, elle a reçu le prix Sakharov pour la liberté de pensée de la part du Parlement européen. Inversement, l’opposition vénézuélienne a approuvé les sanctions des États-Unis empêchant le Venezuela de contracter de nouveaux prêts auprès de citoyenEs ou entreprises étatsuniennes, des mesures qui vont pourtant aggraver la situation dramatique des VénézuélienEs.
Les obstacles bureaucratiques à la gauche
L’opposition est dirigée par des bourgeois favorables aux États-Unis, mais le chavisme est désormais l’otage d’une bureaucratie qui impose ses décisions par son contrôle des institutions. Ainsi, durant ces élections municipales, nombre de candidatEs de gauche indépendants du gouvernement et de l’opposition ont été empêchés de se présenter. Dans d’autres cas, leurs candidatures ont été parsemées d’embûches par les institutions électorales. Dans l’ouest de Caracas, un ancien ministre de Chávez, soutenu par le Parti communiste et un autre parti de gauche, défendait un « chavisme honnête » à 1 000 lieues des pratiques gouvernementales. Par des manœuvres bureaucratiques, son nom n’apparaissait pas sur les machines électroniques de vote.
Après des décennies de bipolarisation parfaite entre le chavisme et l’opposition bourgeoise, une gauche a émergé dans certains endroits lors de ces élections municipales. Á Caracas, le candidat du PCV précédemment évoqué, un ancien membre de Marea Socialista soutenu par un parti d’origine évangéliste et le candidat soutenu par Marea Socialista, totalisent 10 % des suffrages. Il reste encore à donner un contenu de classe à ce mécontentement légitime contre le gouvernement Maduro pour reconstruire l’espérance dans une société socialiste, face à la crise économique dramatique que connaît aujourd’hui le Venezuela.
Pedro Huarcaya