Publié le Vendredi 17 mai 2024 à 12h00.

L’offensive de Kasbarian, le ministre des propriétaires

La nomination de Kasbarian comme ministre du Logement dans le gouvernement Attal marque une inflexion visible dans sa politique en matière de logement. Sa nouvelle offensive contre les locataires du logement social cache mal l’objectif de privilégier le capitalisme immobilier.

Dès 2017, Macron a considéré ce secteur comme secondaire, un secteur où il y a de l’argent qui dort et qui peut être ponctionné selon les besoins. Ses premières mesures ont été la baisse des APL, la baisse des loyers imposée aux bailleurs qui ont dû compenser le manque à gagner et réduire leurs investissements en matière d’entretien et de construction de logements neufs.

La crise du covid, puis la crise sociale qui a suivi, amplifiée par la hausse brutale des prix de l’énergie et la hausse des taux d’intérêt ont entraîné une crise sans précédent du logement. Il n’y a jamais eu aussi peu de logements construits alors que la demande n’a jamais été aussi forte. 

Sauver les profits de l’immobilier

Jusqu’à présent tout le monde se moquait de la situation des mal-logéEs et, année après année, la Fondation Abbé-Pierre égrainait ses chiffres dans la plus grande indifférence des pouvoirs publics. Mais là d’un coup ce ne sont plus seulement les mal-logéEs qui subissent la crise mais tout le marché de l’immobilier. Nombre d’entreprises du bâtiment ont fait faillite en 2023, plus de 50 000, du fait de la chute des constructions alors que le logement social ne peut plus leur venir en secours. Gabriel Attal sous la pression décrète « l’urgence pour le logement en France » parce qu’il lui faut sauver les profits des capitalistes de l’immobilier et choisit Kasbarian pour cette besogne.

Ce dernier s’est fait remarquer en juillet 2023 par une première loi bien réac qu’il fait adopter contre les occupantEs sans titre, squatteurs ou ménages endettés, qui refuseraient de quitter leur logement. Il a démontré à cette occasion ses capacités à manipuler l’opinion et à défendre sans état d’âme une loi répressive qui va aggraver le sort des plus précaires. Sa nomination comme ministre du Logement en février 2024 est vécue comme une provocation par l’ensemble des associations engagées dans la lutte contre le mal-logement. Il est fini le temps des ministres pour faire illusion, issus du logement social tel Klein ou Vergriete. Il est le ministre des propriétaires et du capital immobilier.

Offensive contre le logement social

Sa deuxième loi est une offensive contre le logement social. Le premier volet de l’offensive est de faire sauter les contraintes pour libérer le marché de l’immobilier en commençant par la loi SRU en intégrant dans les quotas de logements sociaux les logements intermédiaires pour cadres et ainsi permettre aux villes, qui préfèrent payer des amendes plutôt que de construire, de s’en tirer à bon compte. La dynamique de cette mesure, c’est évidemment l’effondrement du peu de ce qui se faisait sous la contrainte.

Le deuxième objectif est de redonner aux maires la maîtrise des attributions de logements dans leurs villes. Et il est même question qu’ils récupèrent le contingent préfectoral qui jusqu’à présent permettait le logement des prioritaires DALO. Quel est le maire qui dans ces conditions va s’engager à le faire à deux ans des prochaines municipales ? C’est clairement l’institutionnalisation du clientélisme. 

Pour compléter cette offensive, Kasbarian engage une bataille de diversion en pointant « les locataires à vie » qui resteraient dans leur logement alors qu’ils sont sortis des critères d’attribution du logement HLM. De l’avis même de l’USH (Union des bailleurs sociaux) cela concerne une infime minorité des locataires, et ce n’est pas avec leurs logements qu’on va répondre à la demande. On retrouve là la vieille méthode démagogique qui désigne des cibles à l’opinion pour faire oublier ses responsabilités. On avait vu les « faux chômeurs », les « faux malades », les « faux assistés » ! On a maintenant les « faux locataires » !

Il ne faut pas se faire d’illusions, d’autres lois viendront, toujours plus libérales, parce qu’ils ont d’autres cibles à détricoter pour restaurer leurs profits : la loi DALO est évidemment menacée, mais aussi les APL et tout le logement social qui est un frein objectif à l’expansion de la rente foncière et des profits dans l’immobilier. 

JMB