Les jeunes contre la sélection, les salariéEs des EHPAD et des hôpitaux pour des moyens, les cheminotEs, les travailleurEs de chez Carrefour… ChacunE se bat, contre les licenciements, pour obtenir des moyens, pour de meilleures conditions de travail ou d’études. Avec l’objectif, cette fois, de gagner.
Des mobilisations sur les lieux de travail
À Carrefour, ce sont 2 400 licenciements qui sont annoncés alors que le groupe réalise des centaines de millions d’euros de bénéfices par an, profite de 400 millions d’exonérations de cotisations sociales par an… qu’il transfère à ses actionnaires.
Chez PSA et chez Pimkie, des licenciements sont également annoncés. Cette fois, ils profitent des nouvelles réformes du gouvernement, les ruptures conventionnelles collectives. À Ford Blanquefort, notre porte-parole Philippe Poutou et ses camarades sont confrontés au danger de fermeture de leur entreprise.
À la SNCF, la colère monte contre la dégradation des conditions de travail, chez les aiguilleurs notamment, et dans le contexte des attaques contre le statut. Dans le secteur de la santé, plusieurs dizaines d’hôpitaux et EHPAD sont touchés par des grèves dues au ras-le-bol des personnels qui ne peuvent faire face au manque de moyens. Une première coordination nationale s’est réunie fin janvier.
La jeunesse montrera-t-elle la voie ?
Les 1er et 6 février, les premières grandes journées de mobilisation contre la sélection dans les universités ont été des succès. À l’appel des organisations syndicales des lycées et universités, elles ont regroupé plusieurs milliers de jeunes et d’enseignantEs. Mais surtout, elles ont enclenché une dynamique, avec plusieurs centaines de personnes dans les assemblées générales, des grèves dans de nombreux lycées, des blocages. La coordination nationale initiée par les organisations syndicales structure la mobilisation. La construction d’une auto-organisation des jeunes et des salariéEs du secteur devra se réaliser par en bas, pour prendre la direction des événements et proposer des rythmes plus soutenus et radicaux que ce que proposeront les directions syndicales, mais sans mettre en péril l’unité du mouvement.
Une auto-organisation qui devra également formuler des revendications pour le mouvement avec l’objectif de gagner. Car il existe une alternative nette : soit la sélection, qui limitera l’accès aux diplômes et poussera dans la précarité des millions de jeunes, soit le retrait de la loi Vidal, un investissement massif dans l’éducation avec 25 élèves par classe maximum dans les lycées et les TD, plusieurs centaines de -milliers d’embauches de personnels.
Pour gagner contre Macron, il faut un grand mouvement unitaire
La mobilisation qui débute dans l’éducation peut rendre très optimiste. Elle a tout d’une grande lutte : unité (sous la domination des directions syndicales néanmoins), radicalité et énergie visibles dans les blocages et les manifestations, niveau politique qui croît rapidement (argumentaires, vidéos)…
Mais ces éléments extrêmement positifs ne doivent pas faire oublier que, si les mobilisations de ces dernières années contre la loi travail ont été puissantes, elles n’ont pas gagné. En effet, le gouvernement Macron cherche à transformer profondément le pays, en écrasant les jeunes, les salariéEs, les chômeurEs et les retraitéEs, en décuplant la précarité, en transférant des milliards en direction du grand patronat. Il ne cédera donc pas par de simples mobilisations ponctuelles ou sectorielles.
Il reste d’ailleurs des inconnues dans la situation : les mobilisations en Corse peuvent affaiblir le pouvoir, qui pourrait être également confronté à une crise économique majeure, avec la chute des indices à la bourse de ces derniers jours. Dans une autre sphère, la victoire historique à Notre-Dame-des-Landes, où, après plusieurs décennies de combat, l’État a dû abandonner la construction de l’aéroport, donnera sans doute confiance aux luttes. La solidarité avec les migrantEs se développe, avec des actions de plus en plus nombreuses, qui sont un élément essentiel de la situation politique et qui contribuent elles aussi à affaiblir le gouvernement. Enfin, la confirmation de l’objectif des 120 000 suppressions de postes dans la fonction publique, avec l’hypothèse d’un plan de départs volontaires, pourrait mettre le feu aux poudres.
Une politique claire pour un mouvement plein de potentialité
Dans ce genre de mobilisations, il faut toujours combiner la bataille pour l’unité et l’auto-organisation du mouvement (dans le mouvement de l’éducation, avec d’autres secteurs…), le combat pour une stratégie pour gagner (la grève générale, le blocage du pays) et des éléments revendicatifs et politiques (des moyens, en finir avec ce gouvernement…). Le souci est que, souvent, ces dimensions paraissent contradictoires : l’unité avec les courants réformistes est en forte tension avec une stratégie radicale. La solution à cette équation est pour, les révolutionnaires, la discussion, au sein de la lutte, pour que les jeunes et les salariéEs mobilisés se saisissent des problèmes stratégiques et politiques du mouvement, à travers les cadres d’auto-organisation unitaires.
Antoine Larrache