Lors des rendez-vous politiques de fin août, il aura beaucoup été question des régionales... et cela pas seulement parce que ces rendez-vous se tenaient en région !
Europe Écologie-les Verts se réunissait dans la banlieue de Lille, Ensemble ! à Bordeaux, le Parti de gauche à Toulouse et le Parti communiste aux Karellis en Savoie. Le NPA était invité et présent à l’université d’été d’Ensemble ! pour participer à un débat autour de « quels projets pour la gauche en France ? », ainsi qu’aux « remue-méninges » du PG pour y tenir une table de presse et assister aux échanges.
Des questions qui fâchent
Les discussions en vue de listes aux prochaines élections régionales étaient au cœur de ces rassemblements militants. Elles ont en commun les déclarations de volonté unitaire et les proclamations de listes citoyennes. Dans la réalité, les situations sont assez variées d’une région à l’autre : en Rhône-Alpes-Auvergne (il faut se familiariser avec les nouvelles régions !), un accord EÉLV-PG est déjà acté, et en Nord-Picardie, PACA, Languedoc-Roussillon–Midi-Pyrénées, Aquitaine-Limousin-Poitou-Charente ou Bretagne, les discussions sont en cours entre les mêmes partenaires, avec des degrés d’avancement variables et des chances d’aboutir au final dans cinq ou six régions.
Les camarades d’Ensemble ! plaident pour l’unité, non seulement du Front de gauche, mais au-delà, avec EÉLV, Nouvelle Donne ou la Nouvelle gauche socialiste que vient de créer Liem Hoang-Ngoc... et avec le NPA. Ils militent aussi pour que l’unité se réalise dans toute les régions. Ils et elles ont beau répéter, comme ils et elles le font souvent, qu’il y a « beaucoup plus de points communs que de désaccords », les réalités politiques ont la vie dure et refusent de se laisser enterrer, réapparaissant sous différentes formes.
Ainsi, le non-cumul des mandats est loin d’être une évidence et constitue la question qui fâche avec le PCF, particulièrement en Rhône-Alpes-Auvergne. Autre sujet de discorde, les têtes de listes... à ce jour quasiment toutes revendiquées par EÉLV. Une exigence que le PG cherche à contrer en proposant des « binômes qui garantiraient une représentation de la diversité » dans la version Éric Coquerel, voire en menaçant « de n’être dans aucune liste plutôt que de subir cette annexion » dans la version plus trash de Mélenchon. Le PG, comme Ensemble !, milite pour un label national commun, indispensable selon lui « Si l’on veut une union sincère, sans qu’aucun parti ne puisse se l’attribuer ».
On le voit, le « rassemblement citoyen » ne se proclame pas, et il ne suffit pas d’évoquer Podemos. La réalité demeure celle de cartels d’organisations dans lesquels jouent le rapport de forces entre les partis et la concurrence des sigles... et des égos.
Quelle opposition ?
Enfin et surtout, la question politique incontournable des rapports avec le Parti socialiste n’est pas réglée. Les listes de premier tour sont effectivement indépendantes du PS. Cependant, en Île-de-France par exemple, où la secrétaire nationale d’EÉLV Emmanuelle Cosse sera tête d’une liste sans les composantes du Front de Gauche, il y aura certes « autonomie » face au PS au premier tour... mais en alliance avec le mouvement de Corinne Lepage, ancienne ministre d’Alain Juppé. Enfin, l’hypothétique perspective d’« arriver devant le PS » sert souvent de prétexte pour éluder la question du second tour.
Si les démissions de François de Rugy et Jean-Vincent Placé représentent l’aboutissement d’une piaffante impatience de responsables de premier plan de EÉLV pressés de retourner au gouvernement mener une politique à la fois antisociale et anti-écologique, peut-on vraiment parler d’une « clarification » ? Difficile d’en conclure comme le fait Mélenchon que « L’union de l’opposition de gauche va s’accélérer ». En effet, ce ne sont pas les démissionnaires mais Sandrine Rousseau, porte-parole d’EÉLV et tête de liste dans le Nord, qui déplore que « La seule solution aurait été une liste d’union de toute la gauche » !
Le refus de gérer avec le PS, la construction d’une véritable opposition de gauche à la politique du gouvernement dans les mobilisations et les institutions, sont loin de faire l’unanimité entre et au sein des différentes organisations. Pourtant, à la lumière de l’expérience grecque, au-delà de l’indépendance par rapport au social libéralisme, c’est bien la question de la rupture et de l’affrontement, contre la dette, les privatisations et l’ensemble des politiques d’austérité, qui est posée.
Christine Poupin