Il n’aura pas fallu attendre bien longtemps pour avoir un aperçu de ce que pouvait signifier une gestion municipale dirigée par le Front national. À la tête de 14 villes de plus de 9 000 habitants, les édiles d’extrême droite et leurs 1 625 conseillers municipaux vont pouvoir donner toute la mesure de leurs « talents »...
Ainsi, à Hénin-Beaumont, Steeve Briois, secrétaire général du F Haine, élu maire dés le premier tour, n’aura pas attendu plus d’une semaine pour expulser la Ligue des droits de l’homme de son local, et lui couper toute subvention. Cette décision honteuse n’est pas une maladresse, elle n’est que la mise en application de la politique municipale frontiste énoncée par Marine Le Pen : « mettre les associations au pied du mur ». Et c’est en toute logique que cette doctrine est déclinée à Hénin-Beaumont. Selon Briois, « la LDH est une organisation politisée. Dés l’instant où elle s’immisce dans la vie municipale avec des à priori, on coupe les liens. (...) La fin des dépenses inutiles et onéreuses, c’est maintenant ». Le nouveau maire de Mantes-la-Ville a déjà annoncé qu’il comptait bien « faire d’une pierre deux coups » en suivant l’exemple d’Hénin-Beaumont. Il entend déclarer la LDH non grata, après avoir battu la candidate de la gauche par ailleurs responsable nationale de l’association. À Fréjus, la municipalité frontiste fait stopper la construction d’une mosquée et entend organiser un référendum local... À Hayange, elle s’apprête à prendre un « arrêté anti-mendicité » et à interdire la consommation d’alcool sur la voix publique. À Béziers, au nom de la « laïcité », l’ancien président de Reporters « sans frontières » (sic) a annoncé qu’il n’y aurait plus de « repas halal servis dans les écoles ». Cette annonce, ouvertement islamophobe, n’aura heureusement aucun effet, puisque toutes les cantines scolaires de France proposent des repas de substitution aux enfants qui ne consomment pas de porc.
Des vitrines municipales... à briser !Pour révoltantes qu’elles puissent paraître, toutes ces mesures ne constituent pas une surprise : elles figuraient en toutes lettres dans le « Guide pratique de l’élu FN » édité par le parti avant les élections municipales. Y figure notamment la consigne aux futurs éluEs du « vote contre toutes les subventions aux syndicats locaux, aux associations tournées vers l’international, communautaristes ou politisées dont la Licra le MRAP ou SOS Racisme... » Dans sa stratégie de conquête du pouvoir, le FN compte bien faire des municipalités qu’il gère désormais une vitrine de la société qu’il nous prépare : retour de l’ordre moral, exclusion, haine des étrangers, nationalisme exacerbé, culte du chef, anti-syndicalisme... Certes, il ne dispose pour cela que de 14 villes et peine encore à trouver des équipes locales implantées sur tout le territoire. Il s’agit aussi pour lui de faire aujourd’hui oublier les gestions calamiteuses du passé et les scandales financiers y affairant. Marine Le Pen nous a promis des « gestions irréprochables »...Gageons que la direction du parti veillera attentivement d’ici 2017 à ne pas voir ses élus pris en flagrants délits, comme ce le fût par le passé. Loin de céder au découragement, les antifascistes et les progressistes doivent prendre très au sérieux le travail d’opposition au Front national, tant au plan national qu’à l’échelle locale. Nous surveillerons à la loupe toutes les mesures prises par les édiles d’extrême droite et organiserons partout des mobilisations pour nous y opposer, dans l’unité la plus large et par tous les moyens nécessaires. C’est le sens du travail qu’entend mener le NPA au sein des organisations pour qui l’heure de la contre offensive a sonné... En particulier, les prochaines assises de la Coordination nationale contre l’extrême droite (CONEX) en seront un moment privilégié.
Alain Pojolat