Les mouchoirs sont de sortie au FN pour pleurer le départ de « Marion »… Mais personne ne lui en veut : elle se consacrera à sa famille, sa « petite nation » et compte découvrir enfin le vrai monde de l’entreprise privée. Travail, famille... difficile de lui reprocher quelque chose...
Jean-Marie Le Pen a qualifié son départ de « désertion ». Mais que quitte-t-elle ? Une période de tensions, que l’on imagine plus ou moins décuplées au soir des législatives. D’autant que son retrait est temporaire et qu’elle reste simple adhérente du FN. À quoi ressemblera donc le FN, à son retour déjà attendu ? Peut-être qu’il ne se fera pas au sein d’un « Front national »...
Changer de nom, l’idée n’est pas nouvelle. Avant le congrès de 2014, puis en 2015, Philippot était suspecté d’en chercher un autre (dont « Les Patriotes »). À cette époque, l’odeur de soufre de Jean-Marie Le Pen était de moins en moins supportable, mais Nicolas Bay, secrétaire général, affirmait alors qu’un changement de nom n’était « absolument pas sur la table ». Aujourd’hui, il considère que cela pourrait être un « bon moyen d’être encore plus rassembleur ». L’idée d’un changement de nom fait l’unanimité. Est-ce une manœuvre dilatoire ? Pas impossible, car tout se jouera plus tard lors d’un prochain congrès. Marion Maréchal-Le Pen n’avait-elle pas, en avril, démenti son futur retrait, pour éviter que cela ne pollue la campagne du FN ?
Même Gollnisch, qui reste attaché au nom de Front national, propose « une sorte d’étiquette » utilisée « dans le cadre d’alliances électorales ». Car la question des alliances est réellement au cœur de l’avenir du FN, et le changement de nom dans la logique d’ouverture commencée par l’accord avec Dupont-Aignan. Le principe de l’alliance ne fait donc pas débat, mais avec qui et sur quel programme... ça reste plus flou.
Quelle recomposition ?
Déjà, Philippot « menace » de démissionner en cas d’abandon de la sortie de l’euro. Nicolas Bay, directeur de la campagne des législatives et fort présent sur les médias nationaux, renvoie la discussion après les élections. Selon lui, « le patriotisme économique et l’allègement des charges qui pèsent sur les entreprises » sont plus urgents que les questions monétaires...
De quoi rassurer les alliés du Rassemblement Bleu Marine (RBM) comme Collard et Ménard. C’est aussi la vision du SIEL (Souveraineté, identité et libertés), qui avait quitté le RBM, mécontent du poids du « néo-chevènementiste » de Philippot. Depuis, il n’a de cesse de se présenter comme « l’épicentre de la recomposition de cette nouvelle droite » qui fait de la bataille identitaire un point central. Pour Mégret, le « positionnement à droite aurait facilité l’arrivée de nouveaux électeurs en provenance des Républicains où se trouvait le principal réservoir de voix ».
Petit problème : pas mal comptaient sur la figure de Marion Maréchal-Le Pen pour rassembler ce petit monde issu de La manif pour tous, le PCD de Boutin et Poisson, le versaillais Bouglé, Beigbeder, Vanneste, etc. Autre souci : combien cela pèse-t-il vraiment en nombre de voix ?
Même chez Soral, l’alliance avec Dupont-Aignan a été vue comme « une dynamique d’espoir », cassée faute d’avoir « appliqué la "droite des valeurs" et la "gauche du travail" qui permettrait d’aller chercher les électeurs de Fillon comme ceux de Mélenchon ». Déjà en février, Soral fanfaronnait à propos des 10 % qui pouvaient manquer dans la stratégie électorale du FN : « Celui qui les a, c’est moi, c’est Égalité et réconciliation, aller chercher les musulmans patriotes, ne pas jouer le jeu de la guerre civile ».
Bref, tous ces petits chefs qui gravitent autour et dans le FN pensent être le centre de gravité de sa recomposition. La bataille des ego a commencé.
Commission nationale antifasciste