Un mois après l’assassinat de Nahel, une première mesure chiffrée de la répression d’État est possible. Avec la certitude qu’elle n’est que la partie émergée, car les sources dont nous disposons sont les déclarations tonitruantes des ministres macronistes Darmanin et Dupond-Moretti, et le résultat du travail de solidarité militante autour des victimes, qui ne fait que commencer.
Le média militant Contre-Attaque rappelle qu’« en une année de révolte des Gilets jaunes, 3 204 condamnations ont été prononcées (sur 12 107 interpellations) pour un total de 440 Gilets jaunes incarcérés », des milliers de personnes blessées dont, d’après David Dufresne, 350 à la tête, une trentaine éborgnées et 6 mains arrachées.
Des Gilets jaunes à aujourd’hui, il ne s’agit pas de mettre en concurrence les différentes expressions de la révolte contre ce système, mais de les additionner, tout en pointant les spécificités de chacune, dans l’attente d’analyses plus approfondies.
Des chiffres affolants
La révolte des quartiers populaires en réaction à la mort de Nahel a duré 4 jours mais déclenché un déchaînement de violences policières et judiciaires. Les différents corps policiers engagés dans une véritable guerre dans les quartiers populaires ont provoqué un mort, deux personnes dans le coma, 5 éborgnées et une main arrachée, des dizaines de personnes blessées qui doivent en gérer les conséquences physiques et psychologiques. Et la répression judiciaire a enchaîné : « 3 505 interpellations, dont 1 373 dans la seule zone d’intervention de la préfecture de police, c’est-à-dire à Paris et dans sa petite couronne » (Darmanin) et « 1 278 jugements avec 95 % de condamnations, 905 personnes ont fait l’objet d’une comparution immédiate, 1 056 personnes ont été condamnées, 742 à une peine ferme, le quantum est de 8,2 mois, 600 personnes ont été incarcérées » (Dupond-Moretti).
Et ce n’est pas fini puisque des investigations sont en cours qui déboucheront sur de futures interpellations et poursuites judiciaires. Comme c’est le cas actuellement contre le mouvement écologiste, pour les actions contre Lafarge ou les mégabassines de Sainte-Soline. Des chiffres qui objectivent la montée de l’autoritarisme d’État contre celles et ceux qui contestent les ravages de sa politique et du système qu’il défend.
Terreur d’État dans les quartiers populaires
Si tous les combats sont urgents, celui des quartiers populaires requiert une attention et une solidarité particulières du fait de l’isolement dans lequel les habitantEs doivent mener la résistance quotidiennement. Et c’est bien parce qu’elles et ils affrontent un système raciste global que la répression de la révolte a été et continue d’être aussi violente. Le détail de la répression le dit clairement : les blesséEs, interpelléEs, condamnéEs, ne l’ont pas été pour ce qu’elles et surtout ils ont fait, mais parce qu’elles et ils étaient là, dans ces quartiers. « La moyenne d’âge des 3 500 personnes interpellées se situe entre 17 et 18 ans. (…) la plus jeune personne interpellée a 11 ans, la plus âgée a 59 ans. Ainsi, si la moyenne d’âge des personnes arrêtées se situe entre 17 et 18 ans et qu’un tiers d’entre elles sont mineures, les mineurs interpellés sont extrêmement jeunes », selon Darmanin auditionné au Sénat. On pourrait ajouter que plus de la moitié des personnes déférées n’avaient aucun antécédent judiciaire. Quant aux condamnations elles sont ostensiblement disproportionnées par rapport à la gravité des faits incriminés, des mois de prison ferme pour un vol de magasin sans parler de la simple mise en ligne de vidéos sur les réseaux sociaux. Et autant de vie de jeunes et de tous les membres de leur famille qui ne seront plus les mêmes après les condamnations et les blessures.
Face à ce déferlement, notre position est aussi claire que celle des dirigeants de l’appareil policier, juste diamétralement opposée. Ils réclament l’impunité policière, nous revendiquons la révolte des quartiers populaires comme partie intégrante de notre combat anticapitaliste et qui renforce notre détermination à le mener.